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VAZ
"the lie that matches the furniture"
(narnack)
D'abord, au grand d'abord, il y a le jeu de Jeff Mooridian (alias Bruce
Museum ici), mon batteur préféré. Inventif, intelligent,
technique, franc et puissant. C'est bien simple, depuis les premiers albums
de Hammerhead, je ne rêve que de jouer comme lui… le jour
où je m'installerai derrière un set. Puis il y a cette noise
de plus en plus sombre et obscure qu'élaborent avec vice Jeff et
Paul Erickson (alias le fameux Apollo Loftoff), l'autre tête pensante,
chercheuse et géniale du binôme. Toujours aux relents amphétaminiens,
mais avec un décalage certain, elle se veut très space et
crépusculaire, accentuée qu'elle est par un chant désillusionné,
à distance. Aux petites perles lumineuses et aériennes ("The
post is Past", "The Blue Hour", "Sink the swan",
"Lapp Garou"…) se frottent des interludes faussement musicaux
mais tordus à souhait, et, forcément, pas toujours aboutis
("mensabeast", "wined and blinded", "Ah, my Social
Life"…). La collaboration avec le guitariste et ami Judy Station
(Seawhores) apporte un relief guitaristique plutôt appréciable
qui manquait sur "Dying to Meet you", leur précédent
album. Pour finir, il y a leur approche que j'affectionne. Leur humour,
leur cynisme et leur simplicité. Vaz is no business. Pas de prise
de tête. Un côté losers géniaux. Deux mecs qui,
après plus de quinze ans de complicité, continuent à
s'exprimer en toute liberté sans jamais rien renier de leur héritage.
Après avoir sorti un album pour Load, un pour GSL, les voilà
maintenant chez Narnack ?! A cultiver et à explorer ce qu'ils ont
toujours aimé faire, ils nous gratifient encore d'un très
bon album. Drôle de pochette ; drôle de titre ; drôle
de groupe ; drôle de musique. A-ty-pique.
(chRis A)
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QUARK
"j'ai croqué un pigeon congelé cette nuit"
(autoproduction)
Voilà le genre de disque qui nous donne envie de continuer, envie
d'y croire ! Voilà un groupe dont je ne connais rien, si ce n'est
qu'ils sont originaires de la banlieue parisienne… Rien sur le net
(excepté quelques homonymes), rien nulle part, rien que cette pochette
sobre, intrigante. Le premier morceau débute sur une ligne de basse
rockabilly, guitare jazzy… comme pour mieux nous perdre, comme si
nous en savions déjà trop. Pourtant, nous le comprenons
rapidement : ce trio fait dans le grandiose. Un punk expérimental,
une noise dansante, un post-punk décomplexé… peu importe,
dès le deuxième morceau, on sait qu'il y a du bon ici, du
très bon. J'adore le chant, aux antipodes de ce qu'on entend partout.
Selon les jours, je le rapprocherais de Johnny Rotten, époque PIL,
ou encore du chanteur de The Ex. La classe. Et comme ces deux groupes
à leur grande époque, Quark passent leur temps à
vouloir nous perdre, comme pour mieux nous surprendre. Que je suis heureux
d'entendre un groupe qui ouvre son punk vers d'autres horizons avec autant
de brio. Pas de soucis, on aura du mal à vous enfermer dans une
catégorie. Prenant ici ou là, les trois gars semblent en
connaître un rayon, et le montrent avec une créativité
débordante, mais jamais prétentieuse. Alors sortez-vous
les doigts du cul, éteignez votre télé, et débrouillez
vous pour jeter une oreille sur ce disque.
[mg]
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Voir aussi : PIL, Ned, The Ex
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BULLET
TRAIN TO VEGAS
"We Put Scissors Where Our Mouths Are"
(nitro rds)
Sorti l'année dernière aux États-Unis, cet album
devrait enfin voir le jour en France. Et ce n'est pas un luxe vu les 11
titres que contient cet album. OK, les plus cultivés auront vite
fait de repérer le nom tiré d'un morceau de Drive Like Jehu,
et se faire ainsi une petite idée de l'état d'esprit du
groupe. Et même si ces américains n'ont rien de la copie,
on ne peut nier que les influences ont bien quelque chose de communes
: ces guitares aiguisées par exemple, cette énergie plus
tendue qu'un élastique sur le point d'exploser, cette petite touche
dissonante… En effet, les amateurs de Drive like Jehu et de Hot
Snakes pourront s'en doute s'y retrouver, mais Bullet Train To Vegas n'a
pas signé chez Nitro par hasard. Le groupe transforme le hardcore
noisy et dissonant de leur influence en quelque chose de beaucoup plus
rock'n'roll, de plus mélodique aussi, et sans doute de plus actuel.
Le tube qui ouvre l'album pourra même voler quelques fans à
the Hives, tandis que l'ensemble garde une réelle cohérence
post-hardcore. Certains risquent peut-être d'être gênés
par une voix aigüe, surtout irritante dans les parties mélodiques
(avec cette touche emo-mélo peu convaincante), mais en général,
le travail des guitares et l'énergie incroyable de cet album prendront
le dessus. Une réussite travaillée et explosive qui fait
le pont entre hardcore technique, noise et rock'n'roll rythmé…
[mg]
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Voir aussi : Drive like jehu, Blood Brothers, Rye Coalition, Q and not
U, Les Savy Fav
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THE
INSIDERS
"Gran lux"
(202 prod)
Voilà quelques temps que nous n'avions pas eu de nouvelles de ce
groupe de St Etienne. Pourtant, je me souviens bien de leur musique, quasi
surf, au fort relent rock'n'roll, le tout à la sauce noise chicagosante…
j'en ai gardé de très bon souvenir. Aujourd'hui, après
être passé près d'une signature chez Pias puis Dialektik
(annulée suite à la mort de Tripsichord), le groupe nous
prouve une nouvelle fois son savoir faire… Annoncé comme
enregistré en trois heures, ces quatorze titres (plus un live)
reviennent monter de quelques degrés la température de votre
appartement ! Car le trio n'a pas perdu de son talent. Avec une démarche
noise plus prononcée, le groupe continue de nous lâcher ses
envolées de guitares surf à la manière d'un Man or
Astroman, voyage intergalactique compris. Dommage qu'on ne retienne pas
vraiment les chansons, qu'il n'y ait pas d'éléments fédérateurs
car les morceaux prendraient alors une dimension assez impressionnante…
Peu importe, la démarche n'est certainement pas là (même
si cet album pourrait toucher un public assez varié avec un son
plus précis) ; ici, on enregistre en trois heures, quitte à
y perdre un peu au niveau du son (pas mauvais pour autant), on colle un
joli logo "support the rock against majors movement" (plus vu
depuis les années 90) au dos de la pochette, on se permet une cover
bien graphique (R. Scoarnec), on ne se pose pas de questions superflues
et on se fait plaisir. Et vu le talent que ces messieurs ont à
faire cela, on ne va pas en demander plus.
[mg]
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Voir aussi : Man or Astroman, Jesus lizard
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CHEVREUIL
"capoëira"
(ruminance)
Le nouvel album du duo nantais a été enregistré par
Steve Albini, aux studios Electrical Audio de Chicago… ça
ne me touche pas vraiment, mais cela semble important puisque c'est la
seule mention qui apparaît sur les cartes postales promotionnelles
(en plus du titre de l'album bien entendu). Le groupe strasbourgeois répondant
au doux nom de "Enregistré par Steve Albini" sait encore
de qui se moquer ! Mais passons cette parenthèse pour nous plonger
dans ce "capoeira" que Sickroom sort en même temps aux
Etats-Unis : le duo continue son avancé dans le monde complexe
du mathrock… Autant dire que le Brésil s'est pour une autre
fois ! L'apparition d'un clavier ici, ou d'une voix (Jamie Stewart de
Xiu Xiu) là ne révolutionnera pas la donne. Tony et Julien
maîtrisent toujours aussi bien leur sujet avec un enchaînement
de plans techniques tous plus déstabilisant les uns que les autres.
La formule reste celle que nous leur connaissons : une batterie assez
libre évolue le long d'une juxtaposition de boucles de guitares
répétitives. Les amateurs de Don Caballero ont appris à
manier cette langue. Et, avec un quatrième album dans les pattes,
Chevreuil domine assez bien les finesses du style. On se laisse prendre
sans trop de problèmes par les méandres post-progressives
que les gars nous proposent. Chaque plan peut même devenir une véritable
aubaine pour qui comprend la langue. On regrettera juste une approche
trop pointue qui oublie toute notion émotionnelle. On sent bien
que le synthétiseur et les ambiances développées
à certains moments tentent de rapprocher ces compositions scientifiques
de quelque chose de plus charnel, sans doute plus psychédélique…
mais quelque soit les efforts dans ce sens, les deux nantais semblent
trop cérébraux pour oublier les complexités mathématiques
dans lesquelles ils excellent. Du coup, ceux qui préfèrent
le cœur ou les tripes auront du mal à comprendre ces chansons
adressées au cerveau, mais peu importe, Chevreuil crée une
musique savante pour un public savant, et ne s'en cache guère (ou
juste un peu). Chevreuil n'a pas la révolte de Shellac et c'est
ainsi. L'élite concernée ne leur en tiendra certainement
pas rigueur.
[mg]
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Voir aussi : Don Caballero, Storm and Stress, Cheval de Frise, Battles
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DUET
"the round dance of the shadows"
(space patrol)
Formé à Tours en 2002, Duet (Virginie & David) arrive
dans le paysage musical français à la manière d'un
petit ovni. Présenté en formation réduite basse-batterie-chant,
le groupe évite tous les clichés du genre en proposant une
musique sombre mais mélodique et posée. Et ces ambiances
particulièrement noires nous replongent avec nostalgie aux débuts
des années 80, loin des gesticulations contemporaines. La voix
grave et posée de David n'y est pas pour rien. Attention tout de
même aux quelques relents grunge un peu poussif qui ressortent ici
ou là dans la voix, et qui ne sont malheureusement pas du plus
bel effet. Peu importe, les ambiances éthérées et
suicidaires du groupe prennent une nouvelle dimension quand, à
de trop rares moments, les choeurs de Virginie complètent à
merveille la voix lead. Musicalement, j'apprécie aussi les référence
no-wave qui se marient bien au style exploré. Mais sur toute la
longueur, l'album a malheureusement tendance à s'essouffler, sans
doute par manque de respiration ou d'énergie… quelques morceaux
moins sombres, et plus directs, auraient sans doute été
bien venus. En attendant, quelques soient ses défauts, ce premier
album retient l'attention avec une approche originale et inspirées
qui m'interpelle.
[mg]
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Voir aussi : Bauhaus, Joy Division, Sonic Youth, Nirvana
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BAXTERS
"insanity & illusion"
(autoproduction)
Premier album pour ce groupe orléanais que nous avions déjà
remarqué avec leur précédent maxi. Avec "insanity
& illusion", on reprend les mêmes et on attaque de plus
belle. Rien de neuf donc, mais ça a le mérite d'être
efficace et parfaitement effectué. Si on se replace dans le contexte
historique, nous pourrions facilement dire que les Sleeppers ont passé
beaucoup de temps à écouter Unsane, et que Baxters ont passé
beaucoup de temps à écouter Sleeppers. Résultat des
courses, cet album sonne comme du Sleeppers lorgnant vers Unsane ! Puissant,
lourd, noise, sinueux, Baxters n'a pas à rougir devant les grands
frères de Bordeaux, ils possèdent quasiment les mêmes
atouts, les mêmes possibilités. Bref, en dehors de l'originalité,
les orléanais s'en sortent plutôt bien avec un album qui
devrait ravir les amateurs de cette vision de la noise.
[mg]
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Voir aussi : Sleeppers, Unsane
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