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BASEMENT
"everything gets distorted"
(interference)
Pour les moins de vingt ans, Basement ne doit pas évoquer grand-chose,
mais pour ceux qui ont connu les heureuses années 90, et leur fléau
noise, le retour des Libournais ne peut laisser insensible. Basement possèdent
le bon goût de cette période ; ils semblent connaître
l'histoire de labels comme Touch'n'Go, Amphetamine Reptile ou Dischord
sur le bout des doigts. Et si le quatuor devait difficilement supporter
une place d'outsider remarqué à l'époque, je peux
vous certifier que ce "evertyhing gets distorted" replace les
choses à leur place. Basement assurent et montre aujourd'hui la
voie, tout en continuant à opérer dans un style qu'ils affectionnent
depuis plus de 10 ans. Derrière une pochette qui rappelle certaines
productions Dischord, le groupe livre un album digne des grands. Les guitares
sont superbes. Qu'elles évoluent dans des sphères noisy,
des rythmiques complexes ou des arpèges angoissants, elles apportent
une dimension impressionnante au disque. Côté rythmique,
on joue serré, sans faux pas, en sachant lâcher les chevaux
quand il le faut… Technique sans en faire trop, bruyant sans se
perdre. Le duo basse-batterie impose un style puissant et carré
qui tient les morceaux. Et la production de Nicolas Dick (Kill The Thrill),
même si assez froide, colle parfaitement aux ambiances, rendant
l'ensemble assez énorme. Le seul bémol, lié au style,
est cette fibre mélodique qui fait que Libourne restera en France,
et ne viendra malheureusement pas se coller en banlieue de Chicago ! Mais
peu importe, Basement vient de nous livrer ici l'un de ses plus beaux
coups et nous en profitons !
[mg]
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Voir aussi : Condense, Portobello Bones, Barkmarket, Kepone, Tantrum
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www.basement-dept.com
> disque
disponible dans notre boutique |
THESE
ARMS ARE SNAKES
"easter"
(Jade Tree)
Ami(e)s lectrices, lecteurs.
Selon ma théorie, un groupe de la veine de TAAS ne peut sortir
qu'un seul 'chef-d'œuvre' dans son existence vouée forcément
à être courte… J'aurais parié mon chalet sur
'Oxeneers', leur excellent premier vrai jet et… je serai déjà
en train de dormir le long d'un quai parisien sous une tente 'à
fond la forme'. C'est du concentré de venin qu'ils boivent au petit
déj qui les rend aussi bons ou bien c'est la pluie incessante de
Seattle qui les oblige à rester des journées entières
dans leur local de repète et à bosser comme des dingues
leurs superbes compositions ? Passons en revue cette jeune équipe
à la gueule d'étudiants érudits et aux mèches
longues, nonchalantes mais assurément talentueuses. Vocals: Steve
Snere: c'est d'abord une écriture riche, des textes personnels,
mordants, complexes et beaux appuyés qu'ils sont par une puissance
et une sensibilité vocales très touchantes… du genre
faussement emo; parfaite! Bass and Keyboards: Brian Cook (ex-Botch): mon
bassiste ce héros. Cette grande perche a un son de basse inimitable
(lourd, gras et et technique) et puis il triture tellement à merveille
ses claviers, ses consoles... Sans cette touche 'electro' TAAS ne serait
que TAAV (V is for Vipers). Pigé ? Ces serpents et leur musique
post-hardcore torturée mais génialement construite s'insinuent
et se lovent dans les recoins de votre cerveau dans l'unique but de vous
vous charmer. Drums: Chris Common : nouveau venu et en plus producteur
de cet album, pas mal... surtout que le type a haussé le niveau
de jeu. Technique aussi et redoutablement efficace. Guitar: Ryan Frederiksen:
les lignes aériennes qui par leur portée mélodique
hautement émotionnelle donnent une ampleur phénoménale
à l'ensemble. La guitare joue sur de multiples registres et elles
savent aussi se faire discrètes...intelligentes je vous dis. Vous
voulez que je vous dresse la liste des brûlots indispensables de
cette nouvelle galette ? Vous avez encore un quart d'heure à
consacrer à cette kronik ? Non ? C'est sûr , vous
perdrez moins votre temps en allant aussitôt acheter ce petit bijou...
Un dernier conseil: prenez le temps de bien l'explorer car il est sans
aucun doute bien plus subtil et travaillé que le précédent.
Vous verrez, vous ne pourrez plus vous passer de son étreinte…
Serrez-moi encore plus fort.
(chRisA)
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Voir aussi : At The Drive In, Kill Sadie, Blood Brothers
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www.thesearmsaresnakes.org |
BELONE
QUARTET
"les prémices de la béatitude
naissent de l'amertume"
(kythibong)
Avec son pseudonyme pour jazzeux et son titre à faire fuir mes
amis bikers (ils ont jamais trop aimé la belle écriture,
mais amis bikers), les gars ont tout fait pour nous dérouter. Heureusement,
le quartet n'est qu'un duo et leur titre poético-emo cache en réalité
onze chansons sombres et inspirées que nous aurions eues tord de
ne pas écouter. Car ces deux Nantais seraient plutôt du genre
fan de Black Heart Procession, et leur univers mélancolique n'est
pas pour nous déplaire. Si la marque des maîtres de San Diego
est omniprésente (même genre de mélodies vocales touchantes),
Belone Quartet essaie de se l'approprier avec finesse. L'approche est
plus froide, les sons moins organiques ; certains y verront même
quelques escapades du côté des années 80 ("Top
5" par exemple) ou vers les montées plus noisy de Three Miles
Pilot (vous remarquerez qu'on ne s'en va pas bien loin). Alors, on sent
peut-être un peu trop le travail sur ordinateur, mais cela leur
permet de se détacher de leur influence principale, et ce n'est
pas un mal. Ceci dit, ils ont beau faire des efforts, c'est bien ce spleen
insoluble qui ressort, ce genre de mélodies qui vous mettent le
moral à zéro et vous donnent inévitablement envie
de repenser à votre grand-père que vous aimiez tant ! Putain
de connerie de disque, encore une journée de foutue ! Non, je rigole,
car j'aime bien ce genre de délire à faire pleurer mes amis
bikers (encore eux), et même si il y a encore quelques efforts d'ouverture
à fournir, l'exercice de style est rondement mené. Et si
j'allais fleurir la tombe de pépé moi !
[mg]
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Voir aussi : Black Heart Procession, Three Miles Pilot
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JOE
LALLY
"there to here"
(Dischord)
Eté 1986, Joe Lally, alors roadie du groupe Beefeater, revient
d'une tournée américaine. Il évoque à Tomas
Squip le fait qu'il aimerait jouer de la basse dans un groupe. Au même
moment, Ian McKaye, tout juste sorti de l'implosion d'Embrace, cherche
de son côté un bassiste. Coïncidence. Alors qu'Ian se
met pour la première fois à chanter tout en jouant de la
guitare, Joe lui pratique et apprend à dompter sa basse. L'histoire,
comme un tapis somptueux, se déroule. Avec Brendan Canty et Guy
Picciotto, ils formeront Fugazi, l'un des combos punk les plus influents
de la scène underground américaine. 8 albums après...et
une parenthèse qui n'en finit plus de durer pour le groupe de Washington
DC. 20 ans plus tard, Joe Lally sort son premier album solo. Discrètement,
comme à son habitude, il nous dévoile un peu plus son univers
et ses aptitudes de songwriter. Humilité, sobriété
et simplicité comme lignes directrices. L'homme et le musicien
ne surprennent pas. Sur ces treize plages, on retrouve la voix posée
et douce qu'on lui connaissait déjà sur les morceaux 'by
you' ("Red Medecine") et 'the kill' ("The Argument").
Ses lignes de basse paraissent ici moins complexes, moins fouillées
qu'avant. Plus simples donc mais avec une vibrante résonance qui
confère à l'ensemble un groove assez hypnotique. Sensible
depuis toujours au dub, au reggae, au rock, au blues comme au jazz, Joe
Lally laisse filtrer ses influences pour ne retenir que des lignes et
mélodies épurées et parfois même trop banales.
L'homme a su s'entourer de musiciens et surtout d'amis qui partagent les
mêmes valeurs et la même vision musicale. Jerry Busher, Amy
Farina, Danny Frankel, Eddie Janney, Jason Kourkounis, Ian McKaye, Guy
Picciotto et Scott 'Wino' Weinrich se fondent et servent à merveille
ses compositions. Sans coups d'éclat. Dans la justesse de leurs
propos. Le parolier fait couler une belle écriture, fluide, riche
en images et toute en sensibilité. Le 'sons and daughters' chanté
a capella sur le thème de ce que le mot 'guerre' signifie vraiment
est non seulement un excellent plaidoyer pour la paix mais il montre encore
une fois de plus toute la conscience 'politique' d'un homme ou d'une communauté
toute entière bien encline à voir la musique autrement que
sous le seul regard de l'entertainment. Toute l'équipe Dischord
est là: Don Zientara, Ian McKaye, Chad Clark, Jason Farrell. Un
album solo donc...mais en famille. Une famille et une amitié qui
donnent toujours autant de plaisir à voir et à entendre.
Un argument fort qui vient contredire, une fois de plus, tous ceux qui
pensent que le label n'est plus ce qu'il était... Joe Lally ne
sera peut-être jamais aussi bon que lorsqu'il joue avec ses comparses
de Fugazi mais son travail est suffisamment honnête et riche pour
nous faire passer de bons moments. Paisibles et calmes.
(chRisA)
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www.joelally.com |
LE
SINGE BLANC
"strak!"
(keben / magdalana)
Autrefois, le grand public a pu faire une expérience cosmique avec
Magma, aujourd'hui, le public noise peut retenter l'expérience
avec Le Singe Blanc ! L'animal vient de Metz et nous livre ici un album
bien perché ! On sent bien que la bestiole se nourrit de noise,
comme vous et moi, certains passages le prouvent, mais pas facile de garder
le singe dans sa cage ! Pas de guitare, deux basses, un chant complètement
halluciné s'exprimant dans un langage inventé, des structures
abracadabrantes, Le Singe Blanc nous refait le coup de l'expérience
psychédélique ! Plus classique qu'un Residents, mais plus
barré qu'un Nomeansno en somme ! Musicalement, les basses saturées
retombent régulièrement sur des chemins balisés (par
un grand nombre de groupes lyonnais notamment), mais le chant ne peut
s'empêcher, noyé dans sa réverb martienne, de tirer
l'ensemble vers un trip hallucinogène ! Tant mieux, car si cela
peut surprendre à la première écoute, cette touche
d'originalité permet à l'album de sortir du lot de disques
consensuels qui sortent ces dernières années… Et même
si le disque n'est pas du genre facile d'accès, et qu'il peut devenir
irritant par moment à force d'en faire beaucoup, on ne peut que
saluer cette mise en danger particulièrement habile.
[mg]
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Voir aussi : Nomeansno, Magma, Double Nelson, Residents, Sabot
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MCLUSKY
"mcluskyism"
(Too Pure)
La Grande-Bretagne a toujours été une terre fertile pour
la culture de pousses de poppeux. Fait avéré. Mais en matière
de rock bruyant au regard bien noir...c'est une autre paire de manche.
Trois gallois. McLusky. Un nom qui sort des frontières du pays
du poireau. Deux albums sous la lumière du travail du big boss
de l'Electrical Audio studio, Steve Albini. Des tournées. Un split.
Banal ou pas, McLusky se sera fait entendre...mais peut-être pas
assez pour rencontrer le succès malheureusement. Ce coffret à
titre posthume, composé de trois cds, est le point final d'une
aventure électrique de haute facture. Le cd 'a sides' fait figure
de 'best of' avec les mega hits comme 'lightsabre cocksucking blues',
'to hell with good intentions' ou bien 'without msg I am nothing'. On
a déjà transpiré là-dessus, on passe et on
s'attaque aux deux autres rondelles estampillées unreleased. Et
là on mouille le t-shirt du jour. Car McLusky a un effet immédiat
ou pas. Celui de réveiller le punk rocker qu'on est ou alors qu'on
n'a jamais été. Rock braillard aux textes caustiques, aux
guitares souvent mélodiques et à la rythmique boîte
à claques. Ca joue les trouble-fête dans la cour des Pixies,
Nirvana, Shellac, Kepone and co...et on ne boude pas notre plaisir. Le
'b sides' s'avère excellentissime au point de prendre à
nouveau conscience que ce groupe avait du potentiel, de la réserve.
Les gallois s'essayent à tout avec talent, humour subtil et coups
de gueule...devaient bien s'entendre avec Mr Albini et John Peel ces trois
là. C'est toujours direct, spontané et sans chichi. Il y
a une grosse énergie mais aussi beaucoup d'émotions (trop
de titres à mentionner…). La vérité dans la
sueur. 22 titres qui n'ont rien d'amuse-bouches. Le 'c sides' est un poil
moins bon mais il y a tout de même quelques tueries ('cradling'
est ma préférée) avant d'offrir 9 titres en live
qui donnent toute la mesure de ce que le groupe pouvait dégager.
Au final on se dit qu'on tient un très bon document bourré
d'humilité, de sincérité et d'une ferveur punk rock
qu'on aimerait encore trouver plus souvent. A l'heure où tout le
monde se reforme, Andy Falkous et ses compères tirent le rideau.
Bravo messieurs et merci...l'avenir de McLusky se jouerait maintenant
dans The Future Of The Left… une autre histoire commence.
(chRisA)
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Voir aussi : Pixies, Shellac, Kepone
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www.mclusky.net
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AUDREY
"visible forms"
(sinnbus)
Audrey, c'est un peu cette jeune fille du fond de la classe que peu de
gens remarquent, mais qui vous intrigue avec son air un peu absent. Elle
est différente, loin des modes, pas vraiment rebelle, juste dans
son monde… Elle regarde souvent dehors en pensant à ailleurs.
C'est une rêveuse. Et quand elle parle, plutôt doucement,
elle vous entraîne facilement dans son monde… Quand je la
vois, j'imagine qu'elle doit bien aimé Coco Rosie ou Laura Veirs,
en trouvant cela trop convenu bien entendu… elle dira préférer
For Carnation ou les Rachel's et leurs ambiances plus sombres. Pas de
soucis, nous on l'aime bien Audrey et son monde abstrait, même si
parfois on aimerait qu'elle sorte un peu de ses rêveries pour aller
danser avec nous sur des rythmes endiablés, qu'elle sorte un peu
de sa torpeur pour aller shooter dans des poubelles… mais ce n'est
pas son style. Audrey est plutôt sage et douce, même si tourmentée,
et c'est comme ça qu'on l'aime… Oh, je vous ai dit qu'Audrey
avait quatre visages, huit bras, et qu'elle était suédoise
? Il faudra que je vous en reparle une prochaine fois…
[mg]
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Voir aussi : Laura Veirs, Rachel's, Coco Rosie, For Carnation, Papa M
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www.audrey.se |
VOLT
"Rorhart"
(exile on mainstream / southern)
Le premier album des allemands de Volt ne laisse aucune place à
l'espoir ou à la gaieté, deux sentiments bannis des dictionnaires
du groupe. Leur noise rock est sombre, dure, lourde et aride. Pas là
pour plaire les gars… Pas de compromis. Les structures sont alambiquées,
les rythmes complexes, mais avant tout, l'énergie est destructrice
et malsaine. On pense bien entendu à Jesus Lizard, sans pour autant
être clairement identifiable… juste une même attitude
rampante et angoissante, et cette envie d'en découdre, de bouffer
du politiquement correct… Volt se veut malsain, n'hésitant
pas à provoquer l'auditeur, jouant parfois avec l'esprit perturbé
des premiers Today is the Day (en plus rock)… Le chant est malheureusement
moins inspiré, et cela ne permet pas aux structures de retrouver
un fil conducteur… Du coup, à force de trop tirer sur la
corde, le groupe risque de perdre quelques auditeurs en route, mais ceux
qui viennent ici savent à quoi s'attendre. D'un autre côté,
si les allemands n'ont pas toujours le charisme des grandes références,
ils possèdent une énergie très rock, qui permet au
disque de tenir, ou au moins, de ne pas se perdre trop vite. Bref, si
l'album peut devenir indigeste dans son ensemble, il n'en cache pas pour
autant d'excellents moments que les amateurs de noise rock sauront reconnaître.
Tient, pour l'anecdote, on me fait même remarquer que le riff du
début de "Stativ" est le même que celui d'un morceau
de Pregnant sorti à l'époque… c'est drôle. Au
final, nous avons affaire à un album loin d'être parfait,
peut-être un peu long, mais contenant quelques perles qu'il serait
dommage d'ignorer.
[mg]
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Voir aussi : Jesus Lizard, Today is the Day
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Mathieu
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