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GUINEA
PIG
"s/t"
(Psychotica records / X-Mist)
Encore une preuve de bon goût pour ce label italien. Car en dehors
de quelques lignes de voix que certains auront du mal à accepter,
Guinea Pig (le groupe italien) sait faire sonner un album comme peu. A
l'instar d'un Jesus Lizard, le groupe passe ses bases blues rock bien
grasses dans une moulinette noise déstructurée à
en faire pâlir les acharnés des grandes heures de Touch'n'Go.
Le résultat est démoniaque. Le groupe prend le temps de
vous titiller les nerfs sadiquement avant de vous envoyer un uppercut
direct au visage. Et ne comptez pas sur eux pour s'arrêter quand
vous serez à terre, ces gars là ne sont pas du style à
lâcher leur proie. "Die!", le nom du morceau d'ouverture
n'est pas là pour semer le doute. Rarement un groupe aura su allier
la poisse du rock, santiags aux pieds, avec la finesse chirurgicale d'une
noise millimétrée (en dehors de Jesus Lizard, il en va sans
dire). Et c'est bien dans ces moments là que la noise prend toute
son ampleur. Joli coup.
[mg]
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Voir aussi : Jesus Lizard, Cows
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FRENCH
TOAST
"in a cave"
(Dischord)
La scène de Washington DC a toujours été confuse.
Les groupes se séparent régulièrement, donnant de
nouveaux projets plus ou moins intéressants, les relations incestueuses
entre musiciens sont de plus en plus courantes, et il devient difficile
de s'y retrouver. Cet état de fait est de plus en plus flagrant
ces derniers temps, avec l'absence de groupes majeurs (excepté
peut-être Q and not U et Lungfish), et le break poussé de
Fugazi. C'est dans ce contexte que je découvre il y a deux ans
le premier EP de French Toast, projet réunissant James Canty (Nation
of Ulysses / Make Up) et Jerry Busher (deuxième batteur de Fugazi
/ All Stars). Le résultat semblait prendre ses marques en laissant
prévoir une agréable suite. Aujourd'hui, avec "In A
Cave", le duo s'affiche en lettres capitales avec la caution du label
Dischord. Comme un grand nombre de ses confrères, French Toast
semble revenir à un son typiquement eighties, sans doute plus proche
d'une mode new-wave que d'un quelconque son emocore. Le passage d'El Guapo
dans les rangs du label a fait des émules et French Toast aura
du mal à le nier ! Le groupe troque ainsi régulièrement
la guitare avec un clavier. Si les mélodies restent toujours du
côté des années 80, c'est bien son penchant rock,
presque post-punk, qui nous touchera le plus dans cet album (Lion's Den,
Seen Me…). Nous oublierons par contre l'exercice de style dub trop
classique ("New Dub") qui ne trouve pas sa place ici. Nous sommes
aussi heureux de retrouver aux détours d'un couplet new-wave, une
petite remontée du style Dischord, entendez par là une petite
touche à la Fugazi, comme sur la fin de Off Center. Pas de soucis,
ces gars là ont bien grandi à Washington DC. Et pourtant,
cet album manque un peu de charisme pour vraiment devenir digne de son
CV. La mélodie est belle, mais le style trop convoité. Certains
titres fonctionnent merveilleusement, mais nous sommes en droit d'attendre
plus de la part de ces deux musiciens. Nous aurions aimé plus d'audace.
Tant pis, l'album se laisse tout de même écouter avec plaisir,
avec ses petites chansons faussement sombres et sournoisement classiques
; il ne faudra pas en attendre plus. Bon, et maintenant que chacun à
refait le tour de ces disques 80s avec plus ou moins de succès,
le label ne pourrait-il pas revenir à un son plus novateur ? Car
nous ne pouvons nier que Dischord n'a jamais été aussi bon
que quand il mélangeait la fougue du hardcore à la finesse
qui devint son emblème.
[mg]
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Voir aussi : El Guapo, SuperSystem, Q and not U, New Order
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ARCADE
FIRE
"funeral"
(Rough Trade / Merge)
Phénomène? Le groupe canadien a fait les couvertures de
Télérama, des Inrocks… et n'en finit pas de faire
parler de lui. Ventes impressionnantes. Concerts mémorables et
la sortie ces derniers jours d'un cd 7 titres composé de démos
inédites. Le monde du rock adore se trouver ce genre de poulain
et s'excite facilement quand on les élève en plus au rang
de 'sauveurs' du rock. Alors qu'en est-il de cette clique messianique?
Elle a en effet beaucoup d'atouts pour plaire. Comme Radiohead, Coldplay,
The White Stripes et une poignée d'autres, sa musique est multigénérationnelle.
Les jeunes comme les vieux peuvent se retrouver dans cette pop rythmée,
délicate et intelligente. L'instrumentation guitare discrète,
basse simple, batterie aux accents parfois disco, xylophone, piano et
une bonne couche de cordes caresse dans le sens du poil. Les mélodies
sont souvent subtiles. Les harmonies vocales se boivent comme du petit
lait (personnellement je n'aime pas le timbre de voix de Win Butler).
Les compositions rebondissent assez bien et proposent souvent des finals
intéressants. Il y a forcément des tubes (pour moi c'est
indéniablement le dansant "neighborhood 3 -power out").
L'ensemble est sobrement possédé pour comprendre qu'il vient
tout droit du coeur. Bon alors...c'est l'album de l'année ou quoi ?
Bah...non. Certains morceaux sont un peu faciles ("neighborhood 4-kettles"
et "in the backseat"). Les coulis de violons, quand ils ne donnent
pas dans le mauvais goût façon générique Champs
Elysées, versent un peu trop dans les bons sentiments. Couleur
fleur bleue. 'Y a comme un côté variétoche qui m'empêche
de... Ce penchant à vouloir plaire au grand public qui n'est certainement
pas volontaire ni suspicieux me gêne. Ça sent quand même
parfois comme de la musique pour futures belles publicités télévisées…
celles bien stylisées… vous voyez ? Alors bien sûr
ça n'a rien de franchement méprisable. Arcade Fire n'a rien
du produit élaboré pour faire vendre mais bon de là
à en faire tout un fromage…
(chRisA)
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DAVID
KRAKAUER
"Bubbemeises"
(label bleu)
C'est avec fébrilité que j'ai mis la galette dans mon lecteur.
Je n'avais en effet qu'une peur : être déçu par le
disque après avoir été autant anthousiasmé
par le concert ! J'avais la sensation que je ne pourrais pas y retrouver
l'énergie, la passion, bref, la vie que David Krakauer et le Klezmer
Madness mettent dans leurs prestations live. Fort heureusement, il n'en
est rien. La mayonnaise prend visiblement aussi bien en studio que sur
scène. En grande partie grâce à DJ So Called. Car
elle est là l'idée de génie de David Krakauer : avoir
eu le courage de charger un DJ tout droit venu du hip hop de l'écriture
et de la production d'une grande majorité des morceaux. Cela donne
un melting pot extraordinaire : une base klezmer, cette musique traditionnelle
juive ashkénaze, c'est-à-dire tout droit venue d'Europe
de l'est, assurée par le Klezmer Madness ; et les clarinettes
virtuoses de Krakauer, qui, passées par l'école Coltrane,
vont et viennent en liberté, selon leurs humeurs, parfois disciplinées,
au service d'un morceau, parfois complètement free, en véritables
électrons libres. Le tout mêlé et arrangé par
les interventions de So Called : ici des beats hip hop, là des
samples de chants traditionnels, ailleurs un flow rap. Notre homme y joue
même de l'accordéon et de l'orgue. Pourtant, s'il est la
clé de voûte de ce magnifique ensemble architectural qu'est
"Bubbemeises", il n'en fait jamais trop, s'étant visiblement
donné pour consigne d'être discret. Cela donne un album à
la fois festif et mélancolique (tempérament juif oblige...),
inventif, voyageur et diablement singulier.
[sullivan]
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Voir aussi : la musique klezmer, John Coltrane
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THE
CRIBS
"The New Fellas"
(Witchita – V2)
Comme à l'époque des Stokes, le succès des Franz
Ferdinand a engendré un nombre impressionnant de clones…
au point d'en provoquer l'écœurement. The Cribs nous pondent
là un album tout à fait acceptable, mais débuter
sur un premier titre aussi proche des écossais (la voix) laisse
obligatoirement perplexe. Le reste ne crie pas au génie mais s'écoute
sans effort, avec son calibrage radio, ses petites guitares saturées,
ses mélodies faciles et sa petite fougue de mauvais garçons,
histoire de ne pas oublier qu'il s'agit de rock. The Cribs devraient séduire
tous les fans d'un rock sale "comme il faut", ceux qui se sont
déjà jetés sur les albums des Stokes, puis ceux de
Franz Ferdinand ; Quelque part, The Cribs semblent moins bons pour composer
du tubes prévus pour s'immiscer en haut des charts… la mélodies
est plus simple, moins dansante, mais ce n'est pas plus mal. Pour une
fois, l'aspect binaire de leur chansons serait presque un plus. Ce petit
côté branleur peu facilement ennuyer mais il casse un peu
le côté pré-fabriqué, et c'est toujours ça
de gagner…
[mg]
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voir aussi : The Strokes, franz ferdinand
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HOT
SNAKES
"Peel Sessions"
(swami)
Autant Drive Like Jehu faisait partie du top de la musique émotionnelle
à mes yeux, autant Hot Snakes est en passe de le devenir ! Après
trois albums génialissimes, le groupe, composé autour du
duo imparable John Reis (Drive Like Jehu / Rocket from The Crypt / The
Sultans) et Rick Froberg (Drive Like Jehu) nous livre quatre titres live.
Il s'agit de l'une des dernières sessions enregistrées pour
les Peel Sessions de John Peel avant sa mort. 4 titres allant de 1 minute
30 à 3 minutes maximum, et tout est dit. Car si l'auditeur retrouve
la même sensibilité qu'avec Drive Like Jehu, le groupe ne
s'aventure plus sur des terrains sinueux et torturé. Hot Snakes,
c'est un peu Drive Like Jehu jouant du garage. Pas de morceaux de 8 minutes,
ni de plans noisy à s'en perdre ; ce qui a fait la force et le
mythe de leur précédent groupe est mis de côté
ici. Pas de chichis, de l'émotionnel brut, du rock direct et toujours
autant de frissons. Ceux qui ont eu la chance de voir le groupe sur scène
lors de sa tournée française doivent comprendre de quoi
je parle. John Reis a un jeu de guitare merveilleux que vient sublimement
complémenter celui, plus basique de Rick. Le duo de guitares suffit
à lui seul pour transformer chaque morceau en condensé émotionnel
intense, et me rendre complètement accro. Ajouter à cela
la voix la plus touchante de la scène US, et vous faites de Hot
Snakes, l'un de mes derniers coups de cœur ! C'est imparable ! Le
basse-batterie joue de son côté parfaitement son rôle
(avec l'ancien skatter Mario Rubalcaba derrière les fûts)
laissant la voie libre aux guitares, soutenant le tout, et ajoutant de
la force et du dynamisme aux compositions. Et si certains titres ont déçus
quelques fans sur leur dernier album, vous ne trouverez sur ces sessions
que du tube (Automatic Midnight, No Hands, Braintrust, This Mystic Decade),
sans aucune baisse de régime. Il n'y a que l'habituel pochette
limité au minimum (pas de livret), le prix exagéré
de ce maxi pour une durée de 8 minutes, et l'absence d'inédit,
qui pourrait faire râler. Mais il suffit d'appuyer sur la touche
Play de votre lecteur, pour retrouver le sourire ! Sublime.
[mg]
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Voir aussi : Drive Like Jehu
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KRAKEN
OXEN
"Titan Deceit"
(space patrol)
Suite à la séparation du groupe noise hardcore Weeping Minds
of Silence, les bassistes et guitaristes, frères dans la vie, décident
de remonter le projet Kraken Oxen sur un mode plus ouvert. Composé
par les deux frères, cet album est donc interprété
par un grand nombre d'invités plus connus pour leurs travaux au
sein de Duet, Ezekiel, Enki ou H2Oil (même si le travail de Matthieu
Mellec, chanteur-guitariste d'H2Oil, est plus que sous exploité
à mon goût). Et le résultat de cette collaboration
est étonnamment cohérent. Contrairement au son massif des
WMOS, le choix a été mis sur une ligne plus clair avec des
guitares plus aériennes et des angles presque postrock, même
si l'ensemble garde un pied bien ancré dans une école noise.
L'ambiance générale n'est ainsi pas à la légèreté.
Les morceaux restent toujours très sombres, effet accentué
par un chant souvent noir et désabusé, qu'il soit rock ou
plus folk. Les morceaux
qui abandonnent définitivement le format noise-rock touchent par
une profondeur intéressante. On est remué par cette chape
de plomb que semblent porter les différents musiciens, cette noirceur
terrible qui me rappelle vaguement les ambiances profondes de Blood and
Time (projet du chanteur de Neurosis). Les morceaux plus noise rattrapent
la perte émotionnelle par un dynamisme qui permet à l'album
de ne pas perdre son rythme. Il arrive cependant à certaines collaborations
d'être moins convaincantes, comme avec le chant sur "My Wandering
Spines" qui trouve moins d'intérêt à mes yeux,
mais l'ensemble fonctionne et c'est ce que je retiendrais. Au final, Kraken
Oxen arrive à créer un univers cohérent tout en touchant
à divers aspect de la force. La fin des Weepings Minds ne pouvait
rêver mieux.
[mg]
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Voir aussi : Blood and Time, Weeping Minds of Silence
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THE
DEPARTURE
"Dirty Words"
(parlophone)
Avec le succés de la nouvelle vague disco-punk, chaque maison de
disques veut avoir son Bloc Party ou son Killers. De son côté,
Parlophone a déniché The Departure, qui, après avoir
sorti plusieurs singles pour faire monter la sauce, présente "Dirty
Words". Un album qui démontre combien ce groupe a écouté
Gang of Four, l'influence que l'on retrouve chez nombre de groupes britanniques
actuels. En effet, ces guitares syncopées et tranchantes, au jeu
quasi funk ne trompent pas. Ni cette section rythmique dansante et sautillante
au possible. The Departure y ajoute sa marque de fabrique : un côté
sombre et mélancolique hérité de Joy Division sur
certains morceaux, qui les rapproche alors d'un groupe comme Interpol
ainsi que des refrains imparables qui leur donnent des allures de tubes.
C'est vraiment bien fait, on ne peut le nier. Finalement, The Departure
n'a qu'un tort : celui d'arriver après Radio 4, Bloc Party et autres
Killers...
[sullivan]
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Voir aussi : Gang of Four, Interpol, The Killers, Bloc Party
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www.argument.fr.fm |
ARGUMENT
"s/t"
(kythibong)
Le label nantais Kythibong (Room 204) ne nous avait pas habitué
à tant de fureur. Si Argument regarde aussi du côté
de la scène noise rock US des années 90, ce serait plus
du côté agressif de la chose. Et, ma foi, cela nous change
de la torpeur de certains groupes trop conceptuels entendus ici ou là.
Construits autour d'un basse batterie impénétrable et puissant,
les morceaux travaillent les ambiances sombres avec une certaine violence.
La guitare vient, elle, récurer dans les coins, d'une manière
plus nerveuse. Bien dommage qu'Amphetamine Reptile n'existe plus car ces
jeunes nantais auraient pu y demander une petite place sans avoir trop
à rougir. Il n'y a que le son que nous aurions aimé plus
imposant vu le style. En attendant, le mélange de folie psychiatrique,
d'énergie hardcore, et de plans noise est plus que plaisant. Allez
savoir pourquoi, j'y retrouve la même ambiance pesante qu'avec Condense,
sans pour autant avoir une similitude flagrante. Sans doute une histoire
d'influences, et peut-être de chant.Une chose est sûre, Argument
relance le spectre de dinosaures massifs abusivement oubliés, et
cela devrait tant plaire aux amateurs d'une certaine noise-core des années
90, que nous passerons sous silence les quelques défauts insignifiants
présents ici ou là. Reste à les voir sur scène
pour confirmer l'essai.
[mg]
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Voir aussi : Condense, Jesus Lizard, Unsane, Helmet, Bananas at the Audience
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