BD. Côte atlantique des Etats-Unis, à Roodhaven. O’Brian, Mac Bain et les autres survivants du Golden Licorn sont, comme souvent, occupés à se raconter des histoires de campagnes de chasse, de tempêtes et de baleines géantes à l’auberge du port. Un peu trop imbibé, Mac Bain décide de sortir prendre l’air sur la plage. Là, en train de se soulager, il se retrouve face à un monstre venu de la mer. Un étrange mélange de mécanique et d’organique, à la fois vaisseau et animal qui renferme une jeune femme…
Certains livres ont des histoires incroyables. Aquarica en fait indéniablement partie. Son idée a germé il y a plus de 20 ans quand Schuiten et Sokal, amis de longue date, décidèrent de travailler conjointement, pour la première fois (François Schuiten explique pourquoi dans le passionnant dossier bonus -il revient sur la genèse du projet- qui clôt le tome 2), à un film d’animation, Aquarica. Pour lequel ils passèrent beaucoup de temps à ciseler le scénario et à rencontrer script doctors et producteurs afin de trouver des financements. En vain…le projet semblant trop coûteux. Mais Sokal ne pût se résoudre à abandonner une histoire qui leur avait demandé tant de travail et proposa à son ami de se charger de l‘adapter en bande dessinée. Il s’attela rapidement à la tâche et le premier tome sortit en 2017 mais un cancer lui fût ensuite diagnostiqué et la maladie affaiblit trop Sokal pour qu’il puisse terminer. Il demanda donc à Schuiten de réaliser les 12 dernières pages de l’album ainsi que sa couverture avant de mourir…S’il ne vit pas le résultat final, Sokal aurait probablement été fier de ce diptyque réalisé à quatre mains avec son cher ami. Un récit fantastique singulier qui mêle légendes (celle des sirènes, notamment ou de la naissance de la Terre pour les autochtones amérindiens), aventure, mythologie de marins et écologie. Mené de main de maitre, il propose une narration parfaitement maitrisée qui oppose régulièrement poésie et beauté mystérieuse de la nature et violence des Hommes. Et est magnifiquement mis en images par Sokal, dont le travail graphique a ici une grande force d’évocation. Une jolie ode à la nature et à sa beauté que l’on pourrait regretter un jour…Et à l‘amitié aussi, bien entendu.
(Récit en 2 tomes, 78 et 86 pages – Rue de Sèvres)