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Le tueur. T.8 : L’ordre naturel des choses
Jacamon/Matz
casterman

Le tueur est toujours aussi remonté contre la race humaine mais il s’est récemment découvert une conscience… politique. Ce changement est-il dû au fait qu’il soit devenu père et voie désormais les choses sous un autre angle ? A son rejet de la politique étrangère américaine qui n’hésite pas une seconde à interférer ou même à tuer quand ses intérêts sont en jeu ? A moins qu’on le doive à Katia, la belle cubaine rencontrée dans le cadre de son contrat ? Toujours est-il que dans cette crise vénézuélienne liée à la décision du président de nationaliser le pétrole, notre homme roule maintenant pour Cuba !
Quelle que soit la qualité d’une série au long cours, il devient compliqué, une fois 6 ou 7 tomes parus, de la prolonger sans en même temps perdre en inspiration. A moins de la faire évoluer, d’y ajouter un élément nouveau. C’est l’option qu’a choisie Matz en faisant traverser une crise de conscience à son héros mais surtout en faisant pénétrer la série dans le monde de l’espionnage. Pour ce faire, le scénariste n’y est pas allé par quatre chemins : non seulement il s’est largement inspiré de la crise vénézuélienne pour assurer la crédibilité de l’ensemble mais en plus il se permet, au passage, une charge en bonne et due forme contre les pseudo-démocraties occidentales, Etats-Unis en tête, qui en prennent pour leur grade. Matz parsème ainsi l’ensemble du diptyque de rappels salutaires des diverses et nombreuses ingérences ou exactions étatsuniennes en Amérique latine au cours du XXème siècle, ayant abouti, ici, au meurtre d’un démocrate ou, là, à la prise de pouvoir par un dictateur, pour servir leurs intérêts.
Un tome 8 percutant donc, toujours admirablement dessiné par Jacamon, qui nous plonge avec brio dans les arcanes de la "diplomatie" mondiale entre deux réflexions philosophiques teintées de misanthropie de notre tueur préféré. Mais qui ne clôt pas le récit !
Matz et Jacamon ont dû en effet prendre autant de plaisir à écrire cette histoire que nous à la lire puisqu’ils ont, semble-t-il, décidé de transformer le diptyque en triptyque en cours de route. On ne s’en plaindra pas !
[sullivan]