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BLAST 2. L’Apocalypse selon Saint Jacky (Larcenet)

Les 2 inspecteurs aimeraient bien sûr que ça aille plus vite et que Polza Mancini en vienne aux faits. Car si depuis le début de la garde à vue, le bonhomme coopère et ne se fait pas prier pour parler, il le fait à sa façon, en prenant son temps. Voilà pourquoi les 2 flics en ont assez de ses “salades mystiques” et de ses “élucubrations de poète”. Pourtant, Mancini sait que pour pouvoir comprendre pourquoi il a fait cette chose horrible à Carole Oudinot (dont elle vient d’ailleurs de mourir à l’hôpital), il leur faudra refaire avec lui le chemin des souffrances de l’adolescence liées à son obésité, du deuil de son père, de la culpabilité aussi (c’est lui qui conduisait quand son frère est mort dans l’accident). Il leur faudra connaître sa quête du “Blast”, moment d’extase -rare- pendant lequel l’esprit délesté du corps s’approche tout près du bonheur le plus pur, la rencontre avec la république “mange-misère”, le pouvoir révélateur de l’alcool ou encore l’Apocalypse, délicieuse et puissante, selon Saint Jacky !
Manu Larcenet, qui a prévu 5 tomes de 200 pages chacun, a décidé de prendre son temps avec
“Blast”. Car il sait, comme Polza Mancini, que pour approcher -un peu- la vérité de l’âme humaine, il faut emprunter des chemins de traverse, prendre le temps d’écouter et de regarder, tenir compte des rencontres ou des blessures du passé, invisibles à l’œil nu mais qui n’ont pas encore cicatrisé à l’intérieur. Là n’est pas le seul point commun entre les 2 hommes. Car il y a en effet beaucoup de Manu Larcenet, en exagéré souvent, en fantasmé parfois, en Polza Mancini : l’obésité (l’auteur s’est toujours trouvé trop gros et en a d’ailleurs souffert pendant son enfance), la mort (Larcenet a aussi perdu son père il n’y a pas très longtemps), une certaine misanthropie, l’éloge de la différence ou la peur de la dépression…Façon pour l’auteur de se confronter à ses obsessions pour tenter, par le biais d’une fiction très autobiographique, de les amadouer et de les tenir à distance.
Et le talent de Larcenet lui permet de faire en sorte que cette catharsis finalement très personnelle nous parle. Que ce mélange de trait, spontané, au feutre et de lavis de gris, aussi sombre que superbe, nous touche. Que la trajectoire de Mancini, dont on sait pourtant qu’il a fait quelque chose de terrible, nous émeuve (comme lors de sa rencontre, belle et inattendue, avec un éléphant en pleine campagne ou son émotion à son premier concert de rock, magistralement racontée) et nous bouscule dans nos certitudes. Et que l’on attende chaque nouvel épisode de ce chef-d’œuvre de poésie, d ‘humanité et d’existentialisme avec toujours autant d’impatience !

(BD – dargaud)

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