En 2003, Wazem a débuté une correspondance avec son amie Louise Bonnet, dessinatrice qui a quitté les Studios Lolos (l’atelier où Wazem travaille et où il a d’ailleurs repris sa place) pour aller vivre aux Etats-Unis. Ce livre compile les lettres, dessinées bien sûr !, que l’auteur suisse a envoyées entre 2003 et 2012.
Il lui écrit pour lui démontrer surtout pourquoi elle a eu tort de partir pour « ce pays de paranos aveugles et sourds qui viennent de réélire un très riche et très con homme d’affaires va-t-en-guerre » (cette missive est datée de février 2005…). Notre homme se met donc en scène pour passer en revue tout ce qu’elle a quitté aux Studios Lolos, à commencer par ceux qui y travaillent, au travers de portraits (d’Aloys, illustrateur au look vestimentaire très personnel et à l’humour prononcé, d’Ivain, graphiste « complètement fou », à la coupe de cheveux improbable, qui a peur de son ordinateur ou de Patricia, la patronne réalisatrice et productrice de films susceptible qui roule ses cigarettes…) assez hilarants. Il lui raconte aussi les changements que les lieux connaissent au fil du temps : les départs, les arrivées, les coups de peinture, les réorganisations…
Et puis chemin faisant, Wazem digresse et fait des parenthèses : il parle de ses vacances en famille dans son chalet perdu dans la montagne, de son père fou, de la mort de son ami comédien François Berthet, des journées sabbatiques passées avec sa fille Lucie à ne rien faire ou de son rapport à l’alcool. Il insère ici des extraits de son projet de journal (il s’était fixé comme objectif d’improviser une page par jour, d’un trait) ou là le journal de bord de ses vacances passées à naviguer en Méditerranée sur le voilier de son copain Vincent. Bref, les apartés se multiplient et finissent par former une auberge espagnole dessinée, d’un trait simple et direct, où, mine de rien, Wazem se livre pas mal (cela va de petits détails rigolos -ses petites manies comme sa « peur de la table qui bouge »- à des choses plus intimes comme lorsque l’auteur parle d’amitié, de l’alcool ou de la mort de son ami).
Et au final, « Chère Louise, » s’apparente à une sorte de pendant, plus libre et plus direct, et surtout plus lumineux, de « Mars aller-retour » (le suisse traitait avant tout de son côté obscur dans ce récit sorti l’an dernier chez Futuropolis). Incontournable pour les fans de Wazem et qui veut en découvrir un peu plus sur l’auteur et le contexte quotidien dans lequel ses œuvres sont créées !
(Récit complet – Atrabile)