BD. Les vestiaires de l’école viennent d’être refaits. Les garçons de la classe sont bien sûr curieux de voir ce que cela donne. Les couleurs, bleu-vert, sont plutôt pas mal et il n’y a plus de casiers pour ranger ses affaires. Mais il y a une autre nouveauté qui va davantage poser souci : les douches, qui sont maintenant collectives. Car se mettre à poil devant les copains, ça ne va pas être évident. Surtout pour ceux dont la puberté n’est pas très avancée ! Mais bon, au pire, il y aura toujours moyen de s’en prendre au petit gros de service, Corentin, le souffre-douleur attitré de la classe, pour faire diversion….
Il s’en passe des choses dans les vestiaires, une fois la prof partie, quand on n’est qu’entre garçons. Les plus âgés roulent des mécaniques car ils sont en passe de devenir des hommes. Les plus timides et les plus jeunes restent dans leur coin, n’osant pas se déshabiller et encore moins prendre une douche. Et la tête de turc essaie de se faire oublier pour que l’on ne s’en prenne pas à lui. Dans les vestiaires, on parle beaucoup des filles aussi. On essaie de trouver un moyen de les mater dans la pièce d’à côté. Et on fait des conneries bien entendu : on leur envoie des poils pubiens par la ventilation et on sniffe le gaz des sprays déodorants. Ce sont ces comportements et ces relations, compliquées, entre ados, que Timothée le Boucher explore dans Dans les vestiaires (qui est réédité ici, 6 ans après sa sortie, avec un titre différent et une nouvelle couverture), proche parfois du documentaire sociologique. Notamment pour son parti pris narratif original car les différentes scènes (chaque jeudi quand la classe a cours d’EPS) du récit ont lieu uniquement dans ces fameux vestiaires. Et si on devine parfois le cours qui a lieu sur le stade à côté une fois les élèves sortis, c’est depuis l’intérieur, au travers des vitres floutées, que l’auteur nous permet de les « voir ». Sinon le récit se passe totalement en huis clos, entre garçons. Un dispositif idéal pour observer comment une hiérarchie se met en place dans un groupe d’ados, avec des dominants et des dominés (souvent ceux qui sont différents : roux, petits gros, étrangers…) qui souffrent et peuvent parfois être harcelés pendant des mois. Une plongée très réaliste dans cette période compliquée de la puberté qui, malgré un dessin qui manque un peu de charisme, peut compter sur son dispositif narratif particulier pour retenir l’attention.
(Récit complet, 128 pages – La Boîte à bulles)