BD. Das Feuer. Le Feu, traduit en allemand. Car Joe Pinelli et Patrick Pécherot ont fait un choix osé mais génial quand ils ont décidé d’adapter le roman d’Henri Barbusse, dont le témoignage dénonçant l’horreur de la guerre tout droit sorti des tranchées fut publié en 1916 et obtint le prix Goncourt la même année : transposer le récit dans le camp allemand. Et qu’y voit-on dans ce camp allemand ? Les mêmes visages fatigués, creusés, hagards. Les mêmes soldats perdus, errant comme des fantômes dans le no man’s land à la recherche de leur boyau. Les mêmes cadavres en putréfaction qui se mêlent aux barbelés, aux débris et à la boue. La même peur dans les yeux. La même incompréhension et la même défiance vis à vis de leurs supérieurs. Pas étonnant. Et c’est là que Pinelli et Pécherot nous amènent intelligemment : c’est toujours le peuple qui trinque avec la guerre. Le peuple qui devrait être tout mais qui n’est rien. La démonstration est limpide, portée par le magnifique texte, puissant, plein de colère et de révolte contre les Hommes, d’Henri Barbusse. Et mise en images, avec force, par le dessin au crayon très expressionniste, qui n’est que douleur et incompréhension, sur fond de gris, de Joe Pinelli. Un cri antimilitariste terrible que Pécherot et Pinelli font de nouveau résonner avec talent. Avec ce Das Feuer, on peut clore les hommages bd dans le cadre du centenaire de la grande guerre.
(Récit complet, 200 pages – Casterman)