ALBUM. 20 ans après son premier maxi, Frustration revient donc fêter ses bougies avec « Our Decisions », nouvel album, évidemment dans la droite lignée des précédents.
Car chaque sortie du groupe parisien (du moins, à l’origine, vu la diaspora de ses membres), semble répondre à un plan millimétré. On doit y retrouver son lot de titres post-punk sombres, merveilleusement maîtrisés, quelques refrains à reprendre en choeur, un ou deux ovnis surprenants (autrefois le single dansant) souvent enchainés avec un bon vieux brulot punk à l’énergie débridée. Dernièrement, le groupe ajoute à la règle un ou deux morceaux en français… « Our decisions » répond parfaitement au dogme. Nous voilà rassuré.
Pourtant ce nouvel album révèle son lot de surprises, discrètes, mais néanmoins présentes. Cela commence par la pochette, derrière laquelle on retrouve comme toujours une œuvre de Baldo, mais les couleurs, l’époque, changent des précédentes peintures. Il faut avouer que cette décharge superbement représentée, accolée au titre de l’album (que l’on retrouve scandé sur le premier titre du disque), fonctionne à merveille. Et je ne parle pas des insectes punaisés au dos de la pochette (glaçant). C’est aussi la première fois que le groupe enregistre lui-même (via Nicus, son talentueux guitariste), dans son local de répétition (à Mains-d’œuvre donc), et cela pour tout un album (le groupe le faisait déjà mais uniquement pour ses 45t). Et le mixe est savamment orchestré par Johnathan Lieffroy (Tempomat, Last Night). Bon choix, le disque sonne parfaitement, et ne souffre d’aucune comparaison avec les précédents. On notera par ailleurs les charmants chants d’oiseaux en introduction du premier morceau… alors fini le béton ?
Comme à chaque sortie Frustration nous a gâtés avec son lot de tubes. Après deux morceaux punk/postpunk du plus bel effet, il va sans dire que le refrain de « Catching Your Eyes » risque de faire son petit effet… tout comme « Omerta » le premier morceau en français du disque (d’ailleurs, un livret avec les paroles ne serait pas un luxe). Les amateurs de titres plus sombres, lignée Joy Division / premier New Order, ne seront pas en reste avec « Paws On The Game » et ses choeurs imparables, qui vient clôturer la première face du vinyle. Du grand art.
En face B « Riptide » nous plonge dans une new wave sombre et martial. C’était le deuxième single dévoilé par le label, après le plus punk « State Of Alert ». On enchaine avec « Pale Lights », plus brut, histoire de se rappeler que Frustration est aussi une machine à faire pogoter en concert. C’est alors qu’arrive l’étrange « Vorbeit », comptine délicate et surprenante pendant laquelle Anne, chanteuse d’Hammershøi, invitée pour l’occasion, répond à Fabrice sur de douces mélodies. Étonnant. Comme le veut la tradition, on repart sur les chapeaux de roues avec « Consumé », un morceau typiques du groupe, même si cette fois c’est à nouveau en français qu’il s’adresse à nous. Et je dois avouer que plus Fabrice écrit dans sa langue plus je trouve que cela lui réussit. On finit avec « Secular Prayer » qui réunit tous les ingrédients typiques de Frustration pour un final parfait.
Sur ce nouvel album, le groupe nous prouve qu’avec plus de 20 ans au compteur, il n’a rien perdu de son énergie et de son inspiration. Comme d’autres avant lui, il répète inlassablement la même formule magique, prenant le meilleur du punk et du post-punk, et inlassablement nous tombons sous le charme. C’est beau.