BD. Charlène mène une vie de dingue : entre son boulot, très prenant, d’infirmière (et la pression que son supérieur met à l’hôpital) et son père grabataire, dont elle prend soin au quotidien, la jeune mère célibataire n’a que peu de temps à consacrer à son fils, Brandon. Qui s’occupe, du coup, comme il peut. Souvent en jouant avec son chat Batman. La mort du grand-père, après une chute dans les escaliers et l’arrivée du frère de Charlène, Robbie, va venir bousculer le quotidien de la petite famille…
Hawaï Solitudes : le titre, judicieusement choisi, de l’édition française est bien plus explicite que celui (No One Else) de la version originale. Car ce qui frappe dans ce roman graphique, c’est bien cela : la solitude des êtres. Et si beaucoup de scènes sont muettes, ce n’est pas un hasard : les personnages communiquent très peu et quand c’est le cas, il s’agit de conversations banales, sans grand intérêt. Il en va de même en ce qui concerne le dessin de Kikuo Johnson : un trait simple mais précis réalisé à la palette graphique uniquement « rehaussé » d’aplats de gris informatiques ternes et froids qui met un peu plus encore en exergue le manque de communication et la distance entre les personnages. Car alors que son père vient de mourir, Charlène, un peu aigrie (son frère, en conflit avec leur père, est parti tôt de la maison -étant musicien, il passait son temps en tournée- et l’a laissée s’occuper seule de lui), se réfugie dans la préparation du concours de médecin pour éviter de parler des sujets qui fâchent avec Robbie. Mais néglige aussi de s’occuper de son fils, qui traverse, du coup, cette période de deuil à sa façon…
Hawaï Solitudes est un récit désenchanté qui suggère et montre plus qu’il ne dit tout en livrant un constat amer sur les relations humaines dans les sociétés occidentales. Un livre, formellement très réussi, finalement plus dérangeant qu’il n’y paraît de prime abord…
(Récit complet, 104 pages – Gallimard BD)