BD. Un jour, l’algorithme de Spotify propose Judee Sill comme “artiste qui devrait plaire” à Canales. Curieux, l’espagnol écoute The Kiss et tombe littéralement amoureux de la chanson et de son interprète. Ne la connaissant pas du tout, le scénariste se met à faire des recherches sur elle mais ne trouve pas grand chose. A croire que le monde de la musique a oublié Judee Sill et sa folk. Pourtant, elle a sorti 2 albums remarqués par la critique en 1971 et 73 sur Madhouse records. Et les Turtles lui avaient même acheté une chanson afin de la mettre sur l’un de leurs albums. Mais le succès n’a pas été au rendez-vous. Par faute de chance ? Ou de mauvais choix artistiques ? A moins que ce ne soit à cause de son caractère bien trempé (elle a refusé, par exemple, de continuer à assurer la première partie de groupes plus connus jugeant qu’elle jouait une musique bien plus intéressante que la leur…). Faute de réponses satisfaisantes, Diaz Canales a décidé de se plonger dans les quelques interviews de Sill encore disponibles pour raconter sa trajectoire, s’évertuant à combler les “trous” dans sa biographie de la façon la plus plausible et la plus respectueuse possible. Cela a abouti à cette bande dessinée qui rend hommage, en une dizaine de coups de projecteur sur des moments clés de sa vie (la rencontre avec son imprésario Griffin, ses différents mariages, la complicité avec son père avec qui elle partageait une passion pour les reptiles, ses passages dans des écoles de redressement ou en prison, sa découverte de l’héroïne, dont elle n’arriverait plus, ensuite, à se passer…), à cette artiste maudite qu’ Alonso Iglesias met en images de la seule façon possible quand on met en scène une chanteuse folk junkie des années 70: psychédélique, le dessinateur tentant de restituer visuellement un trip sous acide ou un shoot d’héroïne dans certaines scènes. Un bel hommage, qui propose une plongée réaliste, et donc débridée, dans les années 70 américaines et qui vous donnera peut-être envie,qui sait?, de découvrir les chansons de cette Judee Sill.
(Récit complet, 96 pages – Aire libre)