BD. Le petit François est toujours effondré de chagrin. Depuis qu’on lui a confisqué tous ses animaux (une vraie arche de Noé car le gamin adoptait toutes les créatures affaiblies ou blessées qu’il rencontrait…), sa mère ne sait pas comment lui faire quitter son lit. Mais le garçon n’a pas dit son dernier mot : un soir que sa mère est invitée chez son instituteur, monsieur Boniface, qui veut enregistrer son rire sur la drôle de machine qu’il a inventée, l’Hilarion, François en profite pour partir délivrer Lange Staart, son ami marsupial, aidé de Zat son cheval pottepeï (“alcoolique” en bruxellois) et de Marquis, son marcassin…
Frank Pé et les animaux, c’est une longue histoire. Il n’est donc pas étonnant que l’auteur ait pensé à ce récit du Marsupilami avant qu’on ne l’appelle Marsupilami. Un animal qu’il représente de façon naturaliste, très réaliste donc : une bête (d’où le titre…) avec des besoins physiques, un instinct de survie (il se défend quand il se sent menacé) mais aussi des envies de tendresse. Assez éloigné donc du Marsu cartoonesque créé par Franquin. Qui va trouver l’aide et l’amour dont il a besoin pour survivre dans Bruxelles en la personne de François, un écorché vif qui sait lui aussi ce que c’est d’être différent et ostracisé puisqu’il est né d’un père allemand, un soldat rencontré par sa mère pendant la guerre…Si l’on ajoute le rêveur Boniface, on a là le trio phare de personnages de La Bête, ode à la tolérance, à la différence et à la liberté.
Un très beau diptyque, qui s’empare avec inventivité , humour et talent de ce personnage mythique tout en rendant un magnifique (le travail graphique de Frank Pé -son trait virtuose a tout : il est juste, expressif, plein de vie- est simplement somptueux) hommage à Franquin, présent (presque) en chair et en os (les auteurs ont donné ses traits à Boniface, l’instituteur, inventeur de l’Hilarion, cette machine à rire, une belle idée !) et aux grandes figures de la BD belge auxquelles Zidrou et Pè font de nombreux clins d’œil.
(Récit en deux tomes, 208 pages pour cette deuxième partie – Dupuis)