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LA TERRE DES FILS (Gipi)

Dans un futur post-apocalyptique, un père tente d’apprendre à ses 2 garçons à survivre. Il leur répète sans cesse de ne pas dépasser le lac, car là-bas il n’y a que les morts et les poisons. Ou de garder de bons rapports avec le “fou” Anguilo car il peut toujours rendre service. On ne sait jamais. Et de ne pas approcher les jumeaux Grosse tête. Il doit être dur avec eux et est parfois obligé de leur donner le bâton pour qu’ils écoutent. Car ce ne sont encore que des garçons. Des garçons qui vont bientôt devoir se débrouiller seuls malgré tout. Plus vite qu’ils ne le pensent d’ailleurs…

Le passage à l’âge adulte, la relation père-fils, l’apprentissage de la vie: Gipi explore une nouvelle fois ces thèmes qui lui sont chers dans La terre des fils, récit, comme souvent avec l’auteur italien, bien singulier. Dans le fond, avec ce monde dévasté qui a vu l’Humanité régresser (la plupart des survivants ne savent pas lire et s’expriment dans une langue approximative) et les fidèles d’une secte aux croyances étranges adorant le Dieu Trokool faire régner la terreur dans les parages. Et dans la forme. Avec un dessin au crayon spontané et dépouillé (des hachures font parfois office de mise en couleur et c’est tout…) et une absence totale de récitatifs. Gipi ne dit pas. Il montre. Et ce n’est donc que très progressivement (ce qui explique que le récit court sur presque 300 pages) que l’on comprend quelles règles régissent ce monde terrible (voilà ce que l’on va léguer à nos fils, semble dire Gipi…). Et ce qui anime les différents protagonistes. A part survivre bien sûr. Car dans ce monde dévasté, la violence et le danger sont partout (de même que l’ignorance et l’obscurantisme, mais c’est bien sûr lié…). Car tout le monde se méfie de tout le monde (quand on n’a rien, on est tenté de prendre le peu que les autres ont, y compris leur corps). En tout cas pour les 2 jeunes garçons. La quête de l’Amour. L’Amour de ce père mort, pour le plus jeune d’entre eux, avec qui son géniteur se montrait pourtant souvent dur et qui veut savoir à tout prix ce qu’il écrivait, soir après soir, dans ce cahier secret (ils vont mettre leur vie en danger parce qu’ils partent à la recherche de quelqu’un qui sait lire…). Et l’Amour d’une jeune esclave retrouvée dans une cage chez les jumeaux Grosse tête pour l’aîné.

D’Amour donc (qui pourra peut-être sauver le monde), mais aussi d’absence, de transmission, de construction, d’identité, d’apprentissage, de la figure du père : voilà de quoi Gipi nous parle ici dans ce récit vraiment atypique, à la grammaire séquentielle si particulière et originale, qui confirme encore un peu plus que l’auteur italien est bien l’une des figures marquantes de la bande dessinée actuelle.

(Roman graphique – Futuropolis)