BD. Il y avait bien eu Essence que Fred Bernard avait écrit pour lui et qui était aussi sorti chez Futuropolis mais le dernier récit réalisé en auteur complet par Benjamin Flao commençait un peu à dater puisqu’il s’agissait du diptyque Kililana Song (la deuxième partie est sortie en 2013) qui nous a laissé un grand souvenir de lecture. Et L’Age d’eau risque de laisser la même trace. Belle, poétique, humaniste. Une trace singulière (le narrateur est un chien bleu philosophe à ses heures, par exemple…) et plurielle à la fois. Car L’Age d’eau est porté par plusieurs sentiments. A commencer par l’émerveillement, pour la nature et toutes les beautés dont elle nous fait don. Que l’auteur, par ailleurs grand voyageur, met en avant dans ces quelques séquences de dessins pleine page, superbes, réalisées à la peinture, qui surgissent du récit quand son narrateur canidé se sent d’humeur contemplative et poétique. Mais aussi la tristesse face à cette montée des eaux due au changement climatique annoncée depuis bien longtemps que les humains n’ont pourtant pas réussi à éviter et qui les voit construire des digues plutôt que de changer de mode de vie. Et enfin la colère de voir la société devenir de plus en plus standardisée et formatée, à l’image de ces zones d’habitats flottants que l’état veut faire évacuer pour reloger ses habitants, qui n’ont rien demandé, dans des zones sèches sous prétexte qu’elles représentent un danger…Voilà pourquoi Hans a quitté la ville (où il a fait de la prison pour sabotage…) pour venir chercher son frère, un grand costaud muet et simplet (en apparence…) afin de débusquer un endroit où l’on ne viendra pas déloger leur mère Jeannes…
On n’est qu’à mi-chemin de la traversée (L’Age d’eau est un diptyque) mais cette première partie, magnifique, portée par un trait vivant, très juste, nous fait penser que la soif de liberté (que l’on retrouve dans la narration) et l’esprit contestataire de L’Age d’eau vont marquer les esprits.
(Diptyque, 162 pages – Futuropolis)