Après plusieurs récits autobiographiques dans lesquels elle racontait sa relation avec son amoureux de l’époque (qui n’était autre que Frédéric Boilet) dans « Fraise et chocolat » ou les affres du succès (dans « Buzz Me »), Aurélia Aurita change ici de registre avec « Lap ! » qui la voit s’essayer au reportage.
Le Lap, comme l’appellent ceux qui le fréquentent (profs, élèves, sympathisants…), c’est le lycée autogéré de Paris. Un lycée sans proviseur ni surveillants où les décisions sont prises au sein de commissions par professeurs et élèves à main levé, où professeurs et élèves s’occupent de tout eux-mêmes : budget, entretien, travail administratif ou cuisine…et où le principe est la libre fréquentation des cours. Ici pas de billet de retard ou d’absence : les élèves n’assistent aux cours que s’ils le désirent. L’auteure s’y est donc immergée pendant quelques mois, d’abord comme simple spectatrice de ce lieu au fonctionnement particulier (qui s’adresse bien entendu avant tout aux élèves qui sont rebutés par le système traditionnel), participant aux réunions, parlant avec les élèves, assistant aux cours, puis comme admiratrice de cet endroit dont elle tombe rapidement sous le charme. Car si Aurita essaie de prime abord de rendre compte de ce qu’elle voit avec une certaine objectivité (elle n’hésite pas à montrer les aspects négatifs du « système », comme le faible taux de réussite, autour de 30%, au Bac, la façon, légère, dont les élèves obtiennent les U.V. obligatoires pour passer en classe supérieure ou le fait que certains élèves ne quittent plus le jardin situé à l’arrière du lycée, passant leur temps à fumer et bavarder…), les rencontres qu’elle fait pendant ces longs mois lui font forcément voir les choses avec d’autres yeux. Et elle ne cache d’ailleurs pas l’amitié qu’elle ressent pour le lieu, ses professeurs et les élèves.
Un brin partisan donc, ce reportage dessiné sur le vif, d’un trait jeté, met malgré tout un coup de projecteur bienvenu sur cet endroit atypique peu connu du grand public qui a le grand mérite de se battre (visiblement l’éducation nationale ne le considère pas vraiment comme un projet prioritaire…) pour continuer à exister. Car si cette aire de liberté dans l’enseignement reste aussi imparfaite qu’utopique, elle permet cependant de tester d’autres pédagogies que celles que l’on connaît. Des expérimentations dont le système classique pourrait parfois s’inspirer en ces temps de crise de l’Ecole.
(Récit complet – Les impressions nouvelles)