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LE CIEL DANS LA TETE (Altarriba/Sanchez et Moral)

BD. Les histoires d’Antonio Altarriba sont fortes, sombres souvent et même dérangeantes parfois. Parce qu’elles nous bousculent. Après 2 cycles créatifs pour lesquels il a collaboré avec Kim (L’Aile brisé et L’Art de voler) et Keko (la trilogie du Moi), l’auteur espagnol a cette fois travaillé avec Sanchez, dessinateur qui œuvre habituellement pour la jeunesse et la presse (notamment pour le New-Yorker, dont il a fait plusieurs fois la une avec ses dessins) mais Le Ciel dans la tête reste dans cette même lignée. Illustré comme s’il s’agissait d’un conte (les corps sont régulièrement déformés, les membres des personnages parfois démesurés, les couleurs de Lola Moral avenantes même si le fond des pages est noir), le récit propose néanmoins un portrait désabusé, celui de l’Afrique contemporaine, à travers l’odyssée de Nivek. Un garçon congolais qui va réussir, un peu miraculeusement, à s’extirper des mines de coltan en devenant kadogo, enfant soldat, pour la milice des Raïa Mutomboki qui règne sur la région du sud Kivu. Après une bataille perdue contre les Maï-Maï, il doit s’enfuir à travers le désert avec son seul ami, Joseph. Après la mort de celui-ci, il rencontrera un sorcier puissant qui lui apprendra les secrets de la magie, sera fait prisonnier avant d’être vendu comme esclave, rencontrera la jolie Aisha et parviendra finalement à ses fins : aller en Europe pour que ses enfants aient une vie meilleure…

Traite humaine, exploitation des enfants dans les mines, meurtres et viols perpétrés par les milices (armées par les pays européens ou la Chine pour avoir accès aux minerais…), passeurs véreux : cette plongée dans l’Afrique se fait en apnée, tant les moments pour respirer se font rares. Il y a bien l’amitié avec Joseph et l’amour d’Aisha pour continuer à se battre pour son rêve mais le constat que fait Altarriba est implacable : pris au piège de la pauvreté, proie facile pour milices et passeurs, méprisés quand ils arrivent en Europe, que peuvent espérer les garçons africains comme Nivek ?

Un récit marquant et sans concessions (certaines scènes, même si elles ne sont que suggérées, sont dures), superbement illustré par Sanchez qui fait preuve d’une intéressante inventivité dans son découpage, qui ne laisse pas indemne, Altarriba n’oubliant pas de pointer du doigt la responsabilité des pays occidentaux ou de la Chine (leur politique économique en Afrique ; l’accueil des migrants en Europe…) dans cette situation dramatique…

(Récit complet, 144 pages – Denoël Graphic)

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