BD. Un moine sert fidèlement le seigneur. Tous les jours, il se rend au moulin pour acheter de la farine de seigle puis rentre au monastère pour pétrir et cuire le pain pour partager le corps du Christ avec ses frères lors de la cérémonie. Pourtant, il ne peut s’empêcher de douter car le silence est pesant. Il aimerait un signe de Dieu…qui ne vient pas. Un jour, en pleine prière, le moine est pris d’hallucinations. Un homme venu d’un autre temps et vêtu d’un short et de claquettes lui parle dans une langue étrange. Est-ce là la manifestation du Diable ? L’homme en short tente de le rassurer en lui disant qu’il est juste “foncedé”…
Créées, notamment, par Ugo Bienvenu, les éditions Réalistes sont une petite maison indépendante qui sort une poignée de livres par an. Vous les reconnaitrez facilement : ce sont toujours de tout petit formats. C’est chez Réalistes que Nicolas Pegon avait sorti sa première BD (Les Os creux, la tête pleine) avant de réaliser Hound Dog pour Denoël Graphic qui lui valût le Fauve d’or polar à Angoulême 2023. C’est donc tout naturellement qu’il y revient pour Le Feu de Saint-Antoine, un récit totalement psychédélique. Et pour cause : il s’agit d’un trip, non sous acides mais sous champignons qui, au Moyen-âge, se développaient parfois sur certaines céréales comme le seigle et pouvaient engendrer une maladie, l’ergotisme, aussi appelé feu de Saint-Antoine, dont les symptômes incluaient nausées, convulsions, maux de tête et hallucinations…d’où les terribles scènes, cauchemardesques, qui apparaissent à ce moine (une mouche géante au plafond ; des poissons, échappés de leur aquarium, qui nagent dans les airs ; l’homme étrange en short voit subitement son corps se transformer en serpent…) dont la notion de l’espace-temps devient totalement aléatoire…Et les couleurs fluo (des jaunes, des roses, des verts, des violets flashy comme il faut qui contrastent fortement avec les nombreux aplats de noir) qui accompagnent cette descente aux enfers. Une sorte de Las Vegas Parano (le film de Terry Gilliam, tiré du roman d’Hunter Thompson, avec Johnny Depp) médiéval totalement délirant que Pegon a dû bien triper à mettre en scène !
(Récit complet, 112 pages – Réalistes)