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LE PETIT FRERE (JeanLouis Tripp)

BD. Ce récit, JeanLouis Tripp n‘avait pas prévu de le réaliser. Mais il s’est imposé à lui pendant qu’il terminait le tome 2 d’Extases. Quand, alors qu’il était en vacances en Bretagne en 2019, il entendit à la radio l’histoire de deux enfants renversés par un chauffard qui avait ensuite pris la fuite. Un drame qui le ramena immédiatement 43 ans en arrière quand son frère Gilles est mort dans des conditions similaires alors qu’il n’avait que 11 ans…Il a fallu alors se replonger dans ces souvenirs et aussi, et là ce fût plus difficile, demander à sa mère de lui parler de l’événement et de ce qui se passa ensuite. Pour raconter au mieux la brutalité de l’accident. La sidération aussi face à ce petit corps allongé sur la route entouré de sang. L’attente (cela s’est passé en 1976 et il n’y avait pas encore de portables…), interminable, des secours. La veillée funéraire avec tous ces gens qui défilent à la maison pour présenter leurs condoléances. Les obsèques desquelles les enfants se sentent un peu exclus. Puis, la vie qui continue, tant bien que mal, malgré la culpabilité. Car quand c’est arrivé, JeanLouis Tripp dirigeait une roulotte (c’était les vacances…) et a lâché la main de son frère qui voulait descendre côté route…Une image qui reviendra (comme dans le récit), sans crier gare, le hanter régulièrement dans sa vie…

Comme à son habitude, JeanLouis Tripp raconte tout cela avec beaucoup d’honnêteté et d’humanité, jouant des silences (lors de scène de la veillée, par exemple) pour montrer que les mots ne peuvent rien parfois. S’interroge aussi en chemin sur ce que lui aurait fait à la place du conducteur. Aurait-il aussi pris la fuite, pris de panique ? Il ose espérer que non mais avoue ne pas en être sûr…Et revient sur le procès et l’attitude révoltante de l’accusé et sa famille (leurs regards insistants semblaient rejeter la responsabilité sur le jeune homme de 18 ans qu’il était…) ainsi que de leur avocat (qui, lors de sa plaidoirie, essaya de négocier les indemnités que devait payer son client à la baisse en arguant que la victime, 11 ans, n’était pas soutien de famille et serait même une bouche en moins à nourrir…).

Un livre poignant, probablement cathartique pour son auteur, qui a ici trouvé un bel équilibre, laissant souvent l’émotion affleurer tout en évitant de tomber dans le pathos, notamment grâce à son dessin sobre et très juste réalisé à la palette graphique : un trait souvent épais et baveux qui donne une impression de spontanéité rehaussé de lavis de gris. Un grand récit !

(Récit complet, 344 pages – Casterman)

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