BD. David Smith est assis dans un café. Seul. Il boit whisky-bière sur whisky-bière. Pour oublier ses échecs répétés et son incapacité à tenir la promesse qu’il a faite à son père avant qu’il ne meure: se faire un nom dans le monde de l’Art. Mais David a beau être un sculpteur doué, il est trop entier, trop honnête pour réussir dans ce monde de l’Art de plus en plus mercantile. C’est alors que son oncle Harry, qui est censé être mort depuis des années, vient s’asseoir à sa table. Et lui propose un contrat: lui permettre de réaliser cette promesse en échange de sa vie. Car si David accepte, il n’aura que 200 jours pour profiter de son nouveau don avant de mourir…
Célèbre théoricien du neuvième art, Scott McCloud (à ne pas confondre avec le chanteur-guitariste de Girls Against Boys…) était surtout connu pour ses essais traitant de la bande dessinée en bande dessinée, comme L’Art invisible (Alph’Art du meilleur album étranger en 2000 à Angoulême) ou Faire de la bande dessinée. Jusqu’à ce qu’il ne réalise Le sculpteur en 2015, œuvre que Rue de Sèvres réédite ici (en l’enrichissant d’un cahier graphique et d’un entretien avec l’auteur) et qui démontre que McCloud n’est pas seulement un théoricien. Sa relecture moderne et romantique du mythe de Faust est en effet l’un des romans graphiques les plus marquants de ces dernières années. Ambitieux et thématiquement très riche, Le sculpteur (qui a des points communs avec le Quartier lointain de Taniguchi) déroule une narration incroyablement limpide (le trait, très école américaine, simple mais clair, y contribue grandement) et maîtrisée sur près de 500 pages qui nous parle avec beaucoup de brio de la condition humaine. Amour, vie, réalisation de soi, mort, paternité, Art, désir d’immortalité: au travers de ce que David va vivre au cours de ces 200 jours, c’est tout cela que Scott McCloud aborde ici. Avec inventivité (la première scène mystérieuse avant le très long flash back qui suit est géniale) et un grand souffle romanesque. Une superbe ode à la vie et à l’amour !
(Récit complet – Rue de Sèvres)