BD. 1812, Russie, Borodino. Vincent Bosse est tambour dans la grande armée. Il n’a cessé de marquer le rythme sur son instrument tout au long de la bataille pour encourager les soldats de son bataillon, même aux pires moments, en plein chaos, notamment quand Duclos a été décapité par un sabre russe. Le soir venu, il aimerait bien savoir s’ils ont gagné mais personne ne peut vraiment répondre. En tout cas, ils tiennent la place et pourront évacuer leurs morts et leurs blessés en premier. C’est toujours ça…
Simon Spruyt a imaginé une rencontre : celle de Léon Tolstoï, auteur de Guerre et paix et de l’un des personnages de son roman, Vincent Bosse, arrivé sur ses vieux jours. Comme si le romancier recueillait son témoignage sur la guerre pour y puiser des idées pour son futur livre. Une trouvaille scénaristique amusante qui, surtout, fonctionne très bien puisqu’elle permet à Spruyt d’opérer de fréquents allers et retours entre passé et présent de narration, conférant suspense et mystère à son histoire tout en évitant qu’elle soit linéaire. Mais que va ressortir Léon Tolstoï de l’expérience de Bosse, qui a tout de même survécu à la campagne de Russie de Napoléon ? Sa bravoure ? Son patriotisme ? Ses séquelles psychologiques ? Rien de tout cela. La vérité est plus terre à terre : Vincent Bosse a survécu car il a eu de la chance. De la chance d’avoir une belle gueule (certains croient voir un ange quand ils le regardent…) et d’avoir été protégé par des collègues pour cela. Et car il a su utiliser les circonstances, n’hésitant pas à s’adapter à la situation (entendez par la piller des maisons de Moscou avec Claquebec pour améliorer l’ordinaire ou fuir quand les choses tournaient au vinaigre…). La guerre n’est pas belle, ni héroïque, elle est juste absurde : Simon Spruyt vient nous le rappeler dans ce récit très réussi, à la narration parfaitement huilée et porté par un travail graphique magnifique, mêlant aquarelles et craies grasses, qui livre quelques moments de grâce, notamment lors de la bataille quand certains soldats prennent l’allure de fantômes…. Simon Spruyt signe son arrivée au Lombard de la plus belle des façons !
(Récit complet, 120 pages – Le Lombard)