Alors que sa première victime fut retrouvée en 1982, la police n’arrêta le tueur de la Green River, alias Gary Leon Ridgway, qu’en 2003 en le confondant grâce à un test ADN réalisé à partir d’un prélèvement datant de 1997. Après 188 jours d’interrogatoires, Ridgway est condamné à la prison à perpétuité sans possibilité de libération conditionnelle le 5 novembre 2003 pour les 71 assassinats de prostituées qu’il a avoués.
“Le tueur de la Green River” est le récit d’une double obsession : celle de Ridgway, bien sûr, qui ne pouvait s’empêcher de tuer ces prostituées (il dit qu’il en éprouvait le besoin) après avoir eu une relation sexuelle avec elles mais aussi, et peut-être surtout, celle de Tom Jensen, le détective qui fut nommé sur l’enquête dés 1982 et qui continua à travailler dessus jusqu’en 2003, même quand l’équipe d’investigation mise en place spécialement pour mener à bien ce dossier fut démantelée. Par respect pour les victimes et leurs familles. Voilà pourquoi la narration fait de fréquents allers et retours entre 1982 et les interrogatoires de 2003 et croise les vies des 2 figures centrales de l’enquête, Ridgway et Jensen, comme une sorte de duel à distance, pour nous faire vivre d’une part les premiers pas du serial killer (à 16 ans, il poignarda un petit garçon pour voir ce que cela faisait de tuer), son mode opératoire, sa vie de père de famille “normal” ou ses obsessions et d’autre part les avancées de l’enquête, les doutes de Jensen, ses déceptions jusqu’au rebondissement final et l’analyse d’ADN qui permit l’arrestation de Ridgway.
C’est pour rendre hommage à sa détermination et son abnégation que son fils Jeff, par ailleurs journaliste, a écrit ce livre. Et certainement aussi pour tenter de comprendre celui qui avait occupé le plus clair du temps et de l’esprit de son père pendant plus de 20 ans. S’il n’est hélas pas parvenu à une réponse satisfaisante de ce côté là, son récit rend en tout cas justice au travail de son père de fort belle façon en nous faisant découvrir l’envers du décor de ce genre d’enquête au long cours avec maîtrise. Un très bon cru (avec ce noir et blanc sobre mais efficace et irréprochable techniquement) pour la collection Hostile Holster qui fait aussi un peu froid dans le dos.
(Récit complet – Ankama)