Santiago est un vieux pêcheur cubain devenu bon à rien aux yeux des villageois. Pensez, cela fait 84 jours qu’il revient bredouille de ses sorties quotidiennes en mer ! Seul Manolin, un petit garçon à qui il a appris les ficelles du métier, le respecte encore et le soutient en venant le voir dans sa cabane rudimentaire le soir. Mais la mer, c’est toute la vie de Santiago. Surtout depuis qu’il a perdu sa femme. Alors le vieil homme repart inlassablement le jour suivant aux aurores et rêve de ferrer le gros poisson qui prouvera à tout le monde qu’il n’est pas encore totalement foutu…
C’est une histoire toute simple que ce roman si connu d’Ernest Hemingway. Un homme devenu trop vieux pour être respecté par les gens du village et qui s’obstine pourtant à se battre avec la mer pour regagner sa dignité. Une trame de récit minimaliste, peu de personnages (on peut ajouter le petit garçon au vieux Santiago et la mer, bien sûr), pas beaucoup plus d’action (le roman est surtout psychologique, avec cette lutte, jusqu’à en perdre la raison, que Santiago entame avec LE poisson) et des décors basiques : la mer, omniprésente, magnifique et terrifiante à la fois et la cabane du vieux. Et néanmoins c’est un récit fort et touchant que ce refus de ce qui est finalement l’inéluctable –la vieillesse et la mort- et ce combat pour continuer à rester debout jusqu’à la fin.
Ce qui la rend ici si touchante c’est probablement la sobriété de l’adaptation de Murat. Comme à son habitude depuis quelques récits, l’auteur livre ici un travail graphique épuré (le trait va à l’essentiel, se contentant souvent d’esquisser les contours des personnages tandis que les grands aplats de noir proposent un jeu très intéressant sur les ombres) qui, allié au rythme délibérément lent de la narration, renforce l’impression de solitude du vieux Santiago et met vraiment en exergue son face à face avec la mer, son immensité, son infinité. Très beau récit, une nouvelle fois.
(Roman graphique – Futuropolis)