Jules est au point mort dans sa vie. Sans travail, largué par sa fiancée (la fille de son ancien patron…), il vit depuis dans une caravane, de système D et de petites magouilles. Et passe son temps à rêver à une autre vie, ailleurs. Alors quand il tombe par hasard sur une bande de clandestins éthiopiens cachés dans la forêt en attendant de pouvoir passer en Angleterre, il n’hésite pas une seule seconde à leur venir en aide…
Le premier cycle (prévu en 2 tomes) des “Ames nomades” est construit, habilement, en miroir, autour de quelques flash backs marquants dévoilant progressivement les secrets des 2 protagonistes. Car quand Jules entend l’histoire de ces clandestins, il semble voir, avec Osé, le reflet de sa vie, en inversé, comme lorsque l’on se regarde dans une glace. Il y voit un homme amoureux, courageux aussi, avec une grande force de caractère. Un peu comme lui, avant. En effet, Osé a, de son côté, franchi le pas (logique quand on porte un patronyme comme celui-là) et est parti loin de son pays pour pouvoir retrouver celle qu’il aime.
“Canal” est un récit plaisant, souvent proche de “Welcome”, excellent film de Philippe Lioret, qui part de ces destins individuels pour mieux nous parler de notre monde actuel, ô combien paradoxal, qui voit de plus en plus de citoyens du monde occidental rejeter le modèle de vie qui leur est proposé tandis que de plus en plus de clandestins essaient tout de même de le rejoindre. Humaniste aussi quand il vient nous rappeler que le “pays des droits de l’Homme” oublie souvent les valeurs de tolérance, de fraternité ou de respect qu’il ne prône que quand cela l’arrange. Bref, un premier tome, rythmé et bien dessiné (dans une veine proche –sans toutefois l’égaler- d’un Frederik Peeters), bien agréable.
(Série – Grand angle)