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LES BLEUS ETAIENT VERTS (Jaspard)

ROMAN. Le destin de Max semble tout tracé : la mine et un logement à la Rocamarie, cité de Saint-Étienne. Comme son père Mario et son grand frère Guy. Mais la salle des pendus et arracher du charbon à la roche 600 mètres sous terre, ce n’est pas son truc à Max. Non, ce qu’il veut, lui, c’est voir du pays et, surtout, quitter Saint-Étienne. Alors il s’engage et se retrouve à l’école des élèves-officiers de réserve de l’infanterie, à 100 kilomètres d’Alger. Il y restera, en Algérie, jusqu’à la fin de la guerre, chef de section de vingt chasseurs alpins, à Anaba, à la frontière tunisienne. Globalement, ça se passera bien : il n’aura à tuer personne, essaiera d’être un chef humain et, surtout, il rencontrera Leila, berbère de 16 ans aux yeux bruns qui l’ensorcellera et lui fera oublier Monika, sa fiancée sténodactylo à qui il promettait pourtant de revenir bientôt, dans ses lettres…

A l’image du titre (et de la couverture) qu’il a choisi, le second roman d’Alain Jaspard (réalisateur, il s’est mis à écrire sur le tard) est coloré. Et plein de vie. Car s’il nous raconte les “événements” (comme on disait alors…) d’Algérie, il le fait à sa façon, à hauteur de jeune homme de 20 ans, qui a la naïveté (comme beaucoup d’autres) de demander à aller en Algérie pour voir du pays…Et qui a surtout “les hormones en ébullition”…Alors vous comprendrez que les ordres de De Gaulle passent après les beaux yeux de Leila et sa peau de miel ! Parce que Max, il veut vivre avant tout. L’écriture est à l’avenant, vivante et surprenante (notamment quand l’auteur fait des commentaires sur son propre récit), volontiers ironique, et même sarcastique, surtout quand il s’agit d’évoquer la guerre et les généraux (“les généraux aiment d’autant plus que la troupe tienne des choses coûte que coûte que cela ne leur coûte rien”), mêlant belles trouvailles littéraires (“à la paix comme à la paix”), jeux de mots savoureux (“jurer sur le coran électrique, oui !” lance un fellagha qui vient d’être torturé à la gègène à un observateur de la Croix Rouge) et langage fleuri (“il avale sa Ricoré au soleil sur le pas de la porte de la popote, se gratte le cul et décrète que le temps des embuscades et des ratissages est revenu”), comme peut l’être celui d’un soldat.

Farouchement antimilitariste (“Alors la torture, tu vois Jef, c’est pas pire que le reste, tout est pourri dans la guerre”), et viscéralement humaniste, Les Bleus étaient verts est une jolie ode à la liberté, de la jeunesse française des années 60 qui ne voulait plus être obligé de se marier parce qu’on était enceinte ; de l’Algérie qui rêvait de lendemains démocratiques quand elle organisa le référendum pour l’indépendance en 1962 et de la jeunesse algérienne actuelle qui se bat contre les vieux corrompus du FLN qui construisent des mosquées et distribuent quelques miettes de la manne du pétrole et du gaz pour rester au pouvoir…Une réussite !

(Récit complet, 210 pages – Editions Heloise d’Ormesson)

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