BD. Après un début de carrière qui l’a vu collaborer à des histoires incontournables comme La Nuit de l’inca, Les 5 conteurs de Bagdad ou encore Le Diable amoureux et autres films jamais tournés par Méliès avec Fabien Vehlmann, Franz Duchazeau a ensuite poursuivi sa carrière en solo, avec la même réussite. Avec des récits qui l’ont souvent vu s’intéresser à l’Amérique du Deep South du début du XXe siècle, comme Le Rêve de Météor Slim, Lomax ou encore Blackface Banjo. Il n’est donc pas vraiment surprenant de le voir conter ici les derniers jours de ce Robert Johnson, autre bluesman torturé et maudit. Torturé car sa vie a été jalonné de malheurs (abandonné par son père alors qu’il était tout jeune, il dût ensuite subir la violence de son beau-père et perdit, tout jeune homme, son enfant et sa femme alors que celle-ci était en train d’accoucher) qui le hanteront (cela prend la forme de flashbacks, qui viennent régulièrement interrompre la narration, dans le récit) jusqu’à sa mort et le feront tomber dans l’alcool. Et maudit car alors qu’il peinait à gagner de quoi vivre avec son pote Johnny, tombant régulièrement dans des bagarres dans des joints sordides du Mississippi et finissant souvent la soirée ivre mort dans un fossé, 2 hommes blancs, envoyés de New-York par John Hammond, un découvreur de talents, pour le trouver afin qu’il vienne participer à l’hommage qui allait être rendu à Bessie Smith, décédée un an plus tôt, au Carnegie Hall, le cherchaient sans jamais réussir à lui mettre la main dessus…Un beau récit, au noir et blanc (une évidence !) somptueux, direct et spontané, au crayon pinceau, qui met parfaitement en exergue la magie qui se dégageait quand Johnson prenait sa guitare pour jouer mais aussi le côté sombre du musicien : sa dépendance aux femmes et ses penchants autodestructeurs. Un portrait sans fioritures ni concessions, sur fond de racisme et de ségrégation, qui sonne, du coup, très juste.
(Récit complet, 240 pages – Sarbacane)