BD. « Heureux qui comme Ulysse a fait un beau voyage… » Sauf que l’Ulysse de ce récit n’a pas vraiment vogué sur les mers (il n’a jamais pris l’avion de sa vie…) et qu’à la fin de son voyage (il vient d’être « mis » à la retraite), il n’a pas de Pénélope (sa femme, qui s’appelait réellement Pénélope, est morte quand il avait 45 ans) qui l’attend à la maison…Alors Ulysse, qui déteste lire, s’ennuie ferme dans son appartement. Après quelques mois à errer comme une âme en peine, il annonce donc à son fils, docteur, qu’il va déménager, pour changer d’air. Mais une rencontre va changer ses plans: une patiente de son fils, qui lui fait la conversation dans la salle d’attente du cabinet…
L’obsolescence programmée de nos sentiments est complètement à l’image de Zidrou: étonnant, rempli d’humanité et plein d’optimisme. Qui aurait, en effet, l’idée de raconter l’histoire de 2 sexagénaires mélancoliques que la vie n’a pas épargnés mais qui vont totalement revivre une fois qu’ils se seront rencontrés à part le scénariste belge ? Qui oserait nous montrer leurs corps devenus flasques et ridés s’ébattre comme s’ils avaient 20 ans à part lui ? Qui irait jusqu’à faire…Ah non, désolé, ça je ne peux pas en parler. Il faudra lire L’obsolescence programmée de nos sentiments pour découvrir ce rebondissement plutôt gonflé…
Un beau récit en forme d’ode à la vie, dont on peut (et doit) profiter, contrairement à ce que certains pensent, jusqu’au bout. Qui mêle, comme d’habitude avec notre homme, moments graves, poésie et humour (parfois graveleux). Pour lequel Zidrou a eu raison de faire confiance à Aimée de Jongh (que l’on avait découverte, impressionnés, avec Le retour de la bondrée) pour sa mise en image. Car la jeune dessinatrice néerlandaise livre de nouveau ici une très belle partition graphique: un trait juste et tendre à la fois qui apporte beaucoup de vie à cette histoire. Le début d’une nouvelle collaboration ? On l’espère en tout cas…
(Récit complet, 144 pages – Dargaud)