Si Olivier Mellano est connu pour être le guitariste de Miossec ou Yann Tiersen, on sait moins que c’est en fait un touche à tout qui compose aussi des œuvres ambitieuses abordant des genres aussi différents que le hip hop ou la noise. Pour son nouveau projet, No Land, il a décidé de travailler avec un bagad breton pour voir jusqu’où il pouvait emmener cornemuses et bombardes dans une composition contemporaine. Et il a eu une idée de génie: inviter Brendan Perry à chanter les textes de No Land. Ce qui lui permet de faire d’une pierre deux coups: magnifier sa pièce musicale, longue de 37 minutes, grâce à la voix profonde et grave, magnifique !, de l’un des maîtres à penser de Dead Can Dance, tout en bénéficiant de la renommée de Perry pour attirer davantage de lumière sur No Land. D’ailleurs, soyons honnêtes, si l’on s’est intéressés à cet “album”, c’est justement grâce à la présence de Perry. Sinon, on serait certainement passés à côté. Et cela aurait été clairement dommage. Car en plus de proposer une écriture inspirée, faite de montées en tension et de calmes, de passages bruitistes et de mélodies, de coups de colère et de moments plus sereins, véritablement touchée par la grâce (Brendan Perry, dans ces quelques moments forts, nous donne véritablement des frissons) à 2 ou 3 reprises, No Land est aussi un manifeste politique fort dont nous avons plus que besoin aujourd’hui, à l’heure où beaucoup (mur d’Israël, Brexit, discours protectionniste de Trump, migrants refoulés…) succombent à la tentation du repli sur soi. A la croisée du post-rock engagé de Godspeed You Black Emperor, de la musique traditionnelle bretonne et de l’univers de Dead Can Dance, Perry chante ici, avec talent, que le territoire des hommes est unique et indivisible: c’est la Terre ! Et que ce territoire appartient à tous, au-delà des drapeaux identitaires qui entendent réclamer un quelconque droit sur un morceau de cette terre. Naïf ? Utopiste ? Certainement, mais on a parfois besoin de rêves pour avancer… Une très belle œuvre, qu’il faut voir jouée sur scène, où la puissance du bagad et de la voix de Brendan Perry prennent toute leur ampleur.
(Pièce musicale – World Village)