BD. Après les adaptations marquantes d’ Au-revoir là-haut et Couleurs de l’incendie par De Metter, on attendait avec une vraie impatience celle de Miroir de nos peines, la dernière partie de la trilogie Les Enfants du désastre de Pierre Lemaitre. Inutile de vouloir laisser planer le suspense plus longtemps : c’est une nouvelle fois une grande réussite. Bien sûr, l’intrigue de départ est forte et possède tout ce qu’il faut (du mystère, des personnages complexes et attachants, un contexte hors-norme : celui de la guerre 39-45) pour tenir en haleine mais ce que De Metter en a fait est simplement grandiose. Que ce soit en ce qui concerne la narration, fluide et captivante (les trajectoires de Raoul Landrade et de Louise, qu’apriori tout oppose, que De Metter suit d’abord en parallèle finiront par se rejoindre…) ou le travail graphique, une nouvelle fois sublime. Le jeu sur les lumières (les levers de soleil, par exemple), l’expressivité des visages, les attitudes… : tout sonne juste sous le trait spontané, plein de vie et les couleurs à la peinture de l’auteur. Et une fois que l’on découvre l’histoire de Louise, qui part sur les traces de la vie de sa mère après avoir vu un docteur, qui lui avait proposé de la voir nue contre une très grosse somme d’argent dans un hôtel, se suicider sous ses yeux et de Raoul, pitoyable soldat dans un fort de la ligne Maginot qui, dès qu’il le peut, vole, échange des vivres à des paysans contre de l’essence de l’armée pour les revendre plus cher à ses collègues ou encore joue de mauvais tours à Gabriel, son souffre-douleur, on ne peut plus la lâcher ! Car il y a tout dans cette histoire : les rêves, les grandes lâchetés et l’héroïsme des uns et des autres en période de guerre, les blessures que peuvent laisser l’éducation parentale, les amours complexes dont on ne sort pas indemnes…mais surtout beaucoup d’humanité, cristallisé dans ce personnage étonnant car très ambivalent de Désiré. Du très grand Art. Chapeau bas, monsieur De Metter !
(Récit complet, 176 pages – Rue de Sèvres)