BD. Angel Molina travaille pour Otrament, un centre de recherches affilié au géant Pfizin (toute ressemblance avec un groupe existant réellement n’est pas fortuit…), au Pays Basque. Après avoir écrit quelques pièces de théâtre abordant le thème de la folie dans sa jeunesse, notre homme a abandonné toute ambition littéraire pour travailler pour cette boîte pour laquelle il doit identifier (et au besoin créer…) de nouvelles pathologies dans lesquelles le groupe pourrait investir et se lancer. Une mission qui lui pose de plus en plus de problèmes de conscience et qui n’aide pas à calmer les terribles cauchemars venus de son enfance qui hantent ses nuits. Un jour, un collègue lui confie un dossier qu’il a réuni au sujet d’Otrament et qui prouve le danger de leurs tests ainsi que la menace qu’ils font peser sur les cobayes sur lesquels ils expérimentent et sa volonté de dénoncer le tout aux médias…
Après Moi, assassin, Keko et Altarriba poursuivent ce qui va finalement être une « trilogie du moi » avec ce Moi, fou…Et après avoir proposé une réflexion sur l’Art, la création et la morale, le duo se penche cette fois sur les notions de normalité et de folie. Utilisant une nouvelle fois le cadre du thriller, le binôme plante cette fois son intrigue dans le milieu pharmaceutique. Et son constat est sans appel : ces gens sont prêts à tout pour gagner le plus d’argent possible. Prêts à soudoyer les élus pour qu’ils signent des autorisations de mise sur le marché de leurs médicaments, prêts à arroser les scientifiques pour qu’ils ferment les yeux sur certains effet secondaires potentiellement dangereux ou à créer de nouvelles pathologies qu’il faudra traiter grâce à des médicaments novateurs…Pas si compliqué à faire dans notre société qui n’accepte pas les comportements « différents » et qui essaie de faire rentrer tout le monde dans le même moule. Quitte à faire passer ceux qui n’y arrivent pas (ou ne le peuvent tout simplement pas…) pour des êtres anormaux (comme le héros, considéré comme un pervers, y compris par son père, à l’adolescence, parce qu’il était homosexuel…).
Un second volet une nouvelle fois marquant, porté par le superbe noir et blanc, aussi expressif qu’inquiétant, de Keko, tâché, cette fois (c’était du rouge dans « Moi, assassin »), parfois, de jaune…Il transcende véritablement ce thriller manipulateur en brouillant avec talent les frontières entre réalité et hallucinations (les scènes de cauchemars d’Angel sont d’une force incroyable). Du grand Art. Très critique envers la société et les grands groupes pharmaceutiques.
(Récit complet, 136 pages – Denoël Graphic)
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