Dans une petite ville d’Amérique du nord, le matin. Joe est attablé devant son petit-déjeuner. Il mange tout doucement, à petites bouchées, cherche des excuses pour gagner du temps, espérant manquer le bus qui doit l’emmener à l’école. Devant l’insistance de sa mère, il prend son sac, met son manteau et sort. Mais au lieu de monter dans le bus, il avertit le chauffeur qu’il va aller à l’école à pied, en coupant par la forêt…
Malgré les apparences, ce n’est pas de phobie scolaire dont Joe souffre mais de l’angoisse de rencontrer Jason qui, depuis qu’il l’a choisi comme souffre-douleur, lui fait subir brimades, violences et humiliations en tous genres. A tel point que Joe passe son temps à essayer de l’éviter : en ne prenant pas le même bus que lui, en se cachant dans un local d’entretien le temps de midi ou en se faisant coller pour rester à l’école après les autres, le soir.
Si le récit sonne si juste et parvient si bien à nous faire ressentir l’anxiété, le stress, l’angoisse de Joe, c’est certainement parce qu’avec son dessin en noir et blanc au trait simple, presqu’enfantin, il donne l’impression de sortir tout droit d’un journal intime, celui du jeune garçon. Un choix qui crée indéniablement une proximité avec lui et l’enfer qu’il vit. Mais ce n’est pas la seule bonne idée d’ « Orignal », loin de là ! Il y aussi le décor hivernal typiquement canadien qui renforce encore l’isolement que peut ressentir Joe ou encore, comme une cerise sur le gâteau, cette petite touche fantastique (le fameux orignal du titre) qui participe à la réussite de cette histoire forte et poignante. Enfin, très habilement, Max de Radiguès livre ici ou là des indices permettant de comprendre l’attitude de Jason. On n’en dira bien sûr rien ici pour préserver tout le plaisir de la lecture mais sachez tout de même qu’il est question d’intolérance, d’aprioris et surtout de jalousie et de souffrance !
Un très bon récit et une très bonne découverte en la personne de ce jeune auteur belge à suivre !
(Récit complet – Delcourt)