« C’est l’histoire de quelqu’un qu’essaie d’avancer dans sa vie, qu’est un peu cabossé…D’où la forme de récit éclaté. » C’est Hugo, le héros de ce nouveau récit de Jim, qui présente ainsi les grandes lignes de l’histoire qu’il vient d’écrire à un producteur. Mais à travers lui, c’est aussi le scénariste, Jim, qui semble décrire ici ce qu’il a voulu faire dans « Où sont passés les grands jours ? ». « Envie d’autre chose, de me surprendre, de contourner tout ça…Pour essayer d’approcher l’essentiel…Des petites touches, comme ça, un peu comme la vie ». Voilà qui ressemble effectivement beaucoup à ce diptyque, parfois difficile à saisir, puisqu’il nous parle en effet de la vie. De la vie, de la difficulté de vivre pleinement, de la mort, de l’amour, des amis, des choix que l’on fait pour pouvoir la supporter, la vie. Vaste programme, me direz-vous ! Quasiment de l’existentialisme (pas étonnant d’ailleurs que l’un des récits de Jean-Paul Sartre, « Les mots », ait un rôle non-négligeable à jouer dans la suite de l’histoire). Et bien compliqué à mettre en images. Allez faire ressentir dans des dessins l’angoisse, la mélancolie, l’amertume mais aussi l’envie de se sentir vivant, réellement vivant, quitte à faire des conneries, vous !
Une véritable gageure, je suis d’accord, dont Jim se tire plutôt pas mal. Bien sûr, il y a quelques éléments de son scénario qui pourront paraître un brin naïfs ou peu crédibles mais il arrive malgré tout à saisir ici quelque chose de l’ordre de l’indicible, à capter un peu de cette difficulté de vivre dont on parlait plus tôt au travers de la crise existentielle que traverse Hugo. Car c’est bien de cela dont il s’agit : une crise de la quarantaine. Si en apparence Hugo a, comme on dit, presque tout pour être heureux (une compagne aimante et compréhensive, une jolie petite fille, des potes qu’il apprécie et un boulot, quoique peu passionnant –il est lettreur pour des éditeurs de mangas alors qu’il rêve d’écrire pour le cinéma ou la télévision), le suicide soudain de Fred, son meilleur ami, a remis tout cela en question. Paumé, un peu déprimé, Hugo a fait des conneries…
Une première partie assez prometteuse mise en images par le dessin sobre et fluide de Tefenkgi. Et puis, avouons-le : l’énigme laissée derrière lui par Fred en forme de testament (il a fait remettre, par un notaire, à ses 3 amis des cadeaux –des places d’opéra, le livre « Les mots » de Sartre, un lance-pierres, un monocycle- qui ne correspondent pas vraiment à leurs personnalités respectives) a aussi aiguisé notre curiosité…
(Diptyque – Grand angle)