Patrick Comasson va embarquer pour la Guyane. Il a échappé à la guillotine mais arrivé à Cayenne, il va rapidement comprendre que cette perpétuité là, ce n’est pas vraiment mieux. Pour survivre (l’espérance d’un “fagot”, d’un forçat, n’y dépasse pas 5 ans…), il va lui falloir apprendre vite, très vite ! A se procurer un “plan” (un cylindre où l’on peut cacher ses économies et qu’on s’enfile par derrière…), à se trouver un boulot tranquille moyennant finance, mais surtout, à se faire une réputation, histoire d’éviter de devenir la “pute” de toute la case. Voilà comment lui le petit instituteur est devenu Paco les mains rouges…
Après quelques séjours en Guyane, Sagot rêvait de mettre en images une histoire de bagnards. C’est désormais chose faite avec ce récit écrit par Vehlmann en personne. Notre dessinateur n’est pas trop mal tombé…Car comme à son habitude, notre brillant conteur (à qui l’on doit notamment les excellents “La nuit de l’inca” ou “Le diable amoureux”, tous 2 en collaboration avec Duchazeau) livre ici une partition sans fausse note aucune. Son récit de survie a en effet tout ce qu’il faut pour une nouvelle fois enthousiasmer : une histoire forte qui nous plonge dans l’univers pénitentiaire de Cayenne (que l’on mentionne souvent sans vraiment le connaître !), des personnages marquants qui ont une vraie épaisseur, quelques épisodes de la vie carcérale qui remuent les tripes, un gros travail de recherche en amont qui apporte un vernis de vraisemblance à l’ensemble, sans oublier, bien entendu, quelques petites surprises scénaristiques assez inattendues.
Car “Paco les mains rouges” est aussi une histoire d’amour comme vous en avez probablement rarement lue ! Tout cela a dû en tout cas mettre une jolie pression sur les épaules de Sagot qui se devait, pour le coup, de se montrer à la hauteur. Et le bougre s’en tire mieux que bien avec un dessin de prime abord étonnant (on aurait pu croire qu’il jouerait la carte du réalisme) très stylisé, au trait simple et naïf, mais qui fonctionne parfaitement bien (d’autant qu’il bénéficie d’une mise en couleur en quadrichromie aussi jolie que judicieuse). De la très belle ouvrage. Vraiment.
(Diptyque – Dargaud)