BD. “Tout le monde dans la commune s’inclinera devant toi. Je serai roi…Je serai…empereur !” Peer Gynt est un rêveur, un peu trop sûr de lui, qui rêve en grand, très grand. Mais il n’est pourtant que le fils d’une vieille femme dont le mari les a laissés sur la paille. Un vaurien que tout le monde raille dans le village. Même les ivrognes, comme le forgeron Islak, le ridiculisent en le battant. Cette fois, au grand dam de sa pauvre mère, il s’est mis en tête d’aller séduire la fille d’Haeggstad, quand bien même elle va se marier, le lendemain à Mads Moen…
Antoine Carrion s’est lancé un sacré défi : adapter en BD (et en 2 tomes) la pièce de théâtre créée par Henrik Ibsen à la fin du XIXe siècle alors qu’il faisait le tour des fermes de Norvège pour recenser, à la demande du parlement, contes et légendes qui constituaient l’identité du pays. Dans ce premier tome (qui adapte les 3 premiers actes de la pièce), Peer Gynt s’apparente à un récit initiatique qui voit son (anti-) héros transgresser coutumes et lois, aveuglé qu’il est par sa soif de grandeur et de reconnaissance avant de comprendre (mais n’est-il pas trop tard?) que les actes ont des conséquences, pour lui mais aussi pour sa mère, avec lesquelles il lui faudra ensuite composer toute sa vie. Ambition, désir, culpabilité, folie, exil : Antoine Carrion met tout cela en scène avec fidélité (il a notamment conservé le style, très littéraire, d’Ibsen, certains passages étant en rimes) mais aussi personnalité. Son travail graphique, un noir et blanc rehaussé de gris qui prend son inspiration dans le romantisme du XIXe siècle, est magnifique et offre un décor idéal à la quête teintée de fantastique (à un moment, ses errances le mènent même jusqu’au royaume de Dovre, qui règne sur les Trolls…) de Peer Gynt. Une réussite, à l’édition superbe, comme d’habitude avec la collection Métamorphoses !
(Diptyque, 104 pages pour cet acte 1 – Métamorphoses/Soleil)