Après avoir dessiné “Le val des ânes” (Alph’Art du meilleur premier album à Angoulême) en 2001, Mathieu Blanchin avait attendu 2008 pour sortir un autre livre : le premier tome de la biographie “Martha Jane Cannary” (avec Christian Perrissin). Un trou de 7 ans qu’il explique dans “Quand vous pensiez que j’étais mort”, un livre hors normes, vraiment pas comme les autres !
En 2002, le jour de l’anniversaire de sa fille Jeanne (pas vraiment une coïncidence, on l’apprendra plus tard…), l’auteur est en proie à de violents maux de tête. Lui qui, les quelques jours précédents, jouait à “Monsieur tout va bien” pour ne pas inquiéter ses proches ne peut cette fois plus cacher la situation : il est conduit à l’hôpital où après 2 jours de tergiversations on détecte une tumeur dans son cerveau. Opéré d’urgence (à force d’attendre, une hémorragie intracrânienne avait fini par se déclarer), il restera 3 semaines dans le coma. De retour parmi les vivants, Blanchin n’en a pourtant pas fini avec ses problèmes de santé : en plus de la rééducation, de très grandes fatigues et d’une rechute, l’auteur commence à faire des crises d’épilepsie de plus en plus régulières et fortes. Et c’est en discutant avec son ostéopathe et son psychanalyste qu’il réalise qu’il doit comprendre pourquoi tout cela lui arrive pour enfin pouvoir vivre…et dessiner de nouveau !
C’est tout cela qu’il raconte ici : ce qu’il vécut lors de son coma (la douleur incroyablement violente de l’attaque de la tumeur et de l’hémorragie et ses conséquences sur son inconscient comme les cauchemars extrêmement réalistes qu’elle entraîna ; sa perception des choses, hyper sensible et décuplée, alors que voulant communiquer à tout prix avec ses proches, il était prisonnier de ce corps amorphe ; le combat entre la vie et la mort –une partie de lui lui ordonnait de se relever alors qu’une autre partie lui susurrait de laisser tomber face à ces attaques de plus en plus invalidantes et douloureuses- qui s’était engagé dans son esprit) mais aussi sa lente renaissance, entouré de ses proches et surtout de sa femme Isabelle et le travail sur lui-même (par la psychanalyse mais aussi la méditation, la kinésiologie voire même une forme de shamanisme) qu’il entreprit pour comprendre pourquoi tout cela lui était arrivé et enfin maîtriser ses émotions.
“Quand vous pensiez que j’étais mort” est de ces récits qui vous happent et vous secouent. Car il met en exergue ce que l’on ne veut parfois pas admettre : l’influence prépondérante de l’esprit sur le corps, la fameuse somatisation qui fait qu’une blessure d’enfance peut entraîner un cancer ou une dépression quand on est adulte. D’une grande richesse (sur un plan graphique également car Blanchin fait preuve de beaucoup d’inventivité pour mettre en images félicité, cauchemars ou extrêmes souffrances), car il aborde aussi les médecines alternatives (un pan très intéressant du livre), c’est le récit d’un incroyable retour à la vie qui s’aventure dans des endroits rarement explorés (que ce soit en bd ou ailleurs). Un choc graphique ! Vraiment !
(Récit complet – Futuropolis)