L’expédition approche du pays des brumes. Bientôt Gundersen, Seena et le couple Wingate devront se séparer des Nildoror qui les ont amenés jusque là et qui rejoindront ensuite le site du rite de la Renaissance, interdit aux humains. Une proximité qui agit comme un révélateur sur les 4 participants. Sam et Dorothy sont de nouveau amoureux. Quant à Gundersen, il comprend enfin pourquoi il est revenu sur Belzagor tant d’années après. Pour retrouver Seena, bien sûr, mais aussi, et surtout, pour faire la paix avec la planète et ses habitants, les Nildoror et les Sulidoror à qui il (tout comme beaucoup d’autres colons) a souvent manqué de respect, et qu’il a même méprisé, par le passé. Et si pour cela il lui fallait lui aussi participer à ce rite pour renaître ?
La science-fiction se propose souvent d’être un miroir que ses auteurs nous tendent pour nous donner à voir, par le prisme de l’imaginaire bien sûr, qui nous sommes vraiment. C’est aussi ce que font Thirault et Zuccheri (en plus de proposer un récit par ailleurs divertissant, bien sûr) avec Retour sur Belzagor, nous obligeant à voir les comportements odieux et détestables des blancs lors de la colonisation. Car ces Nildoror et ces Sulidoror pourraient être les algériens ou les marocains des français. Ou les indiens des américains. Des êtres que l’on méprise et que l’on traite comme inférieurs parce qu’on ne comprend pas leurs coutumes, leurs mœurs ou leur religion. Et parce que cela nous arrange bien de croire qu’ils sont inférieurs. C’est plus facile alors de justifier des comportements innommables…Si ce message anticolonialiste passe bien dans ce diptyque, c’est qu’il est servi par un scénario qui tient bien la route et nous réserve pas mal de surprises au sujet de cette exoplanète et de ses habitants mystérieux jusqu’à la révélation finale liée, bien entendu, à ce rite de la Renaissance (et à la très belle idée qu’il contient, qui puise dans la vision amérindienne du monde et sa façon de vivre en harmonie avec la nature) auquel on assiste. Et par un dessin réaliste, assez classique certes, mais techniquement impressionnant qui fait preuve d’une belle inventivité pour mettre en images l’univers de cette planète lointaine ainsi que ses habitants. Un bon diptyque (l’adaptation, en fait, de Les profondeurs de la Terre, roman de l’américain Robert Silverberg) à offrir à un sympathisant des Républicains qui pense encore que la colonisation a eu des aspects positifs.
(Diptyque – Les Humanoïdes Associés)