CANDIES ">leaving our homes"
(ee:lettro/Turn – 9 titres)
Candies, c'est un peu cette rivière, calme et romantique, perdue dans un cadre magnifique, et dans laquelle vous n'hésiterez pas à vous baigner… Pourtant cette rivière se transforme rapidement, au détour d'un rocher, en eau vive et tourbillonnante, puis en une cascade destructrice. Ce groupe italien nous livre ici un premier album particulièrement marquant. Comme les gens qui les entourent sur certains morceaux, deux membres de Calexico et le guitariste de Trumans Water qui offre sa voix, le trio n'hésite pas à étendre son spectre musical sur 360°. Si l'ensemble garde une impressionnante maîtrise de l'ambiance, les chansons passent, elles, d'un envoûtement aérien digne des premiers Tortoise à des déchirures noise ou 70's. Certains titres se permettent même des dérives noise-punk aussi délurées que celles de Trumans Water ("we can leave"). Au final, ce premier album, sorti il y a quelques mois et aidé d'une production sur mesure, devrait dévoiler un nouveau groupe italien hors de ses frontières (après Uzeda et Three Second Kiss).
[mg]

>> Voir Aussi : Billy Mahonie, Tortoise, Sonic Youth, Trumans Water, Calexico, 90 Day Men

REPLICATOR "Winterval"
(autoproduction – 9 titres)
Si ces Américains ont enregistré leur album avec Bob Weston (Shellac), ce n'est certainement pas un hasard. Derrière ce son de guitare gras et noisy se cache en réalité des rythmiques acérées qui trahissent un goût certain pour l'aspect brut, anguleux et énergique de Shellac. Cependant, si le trio de Chicago doit faire partie des références du groupe, Replicator possède un mélange bien à lui, combinant les boucles rigides de Shellac avec un rock plus mélodique et explosif, ainsi qu'avec un attrait indéniable pour les passages atmosphériques. Du coup, sur les neuf titres de cet album, il arrive qu'on s'y perde… Retrouvant parfois l'expérimentation de Sonic Youth, les envolées de Mogwaï, les cassures de Shellac, le mal-être de Lowercase ou des mélodies plus traditionnellement indie, on ne sait plus trop quelle est l'identité du groupe. Peu importe, cela change de ces groupes qui s'enferment dans un style comme dans une prison. Et si ce trio originaire de la région de San Francisco n'atteint pas encore le niveau de ses références, il propose ici un premier album très prometteur qui possède toutes les qualités pour éveiller notre curiosité. Parfois même plus. Par ailleurs, les spécialistes seront heureux d'apprendre que le groupe compte un ex-Saraswati (groupe américain, esprit June of 44, tout aussi inconnu que Replicator, mais de très grande qualité)… Vivement la suite, et pourquoi pas sur un label digne de ce nom ?
[mg]

>> Voir Aussi : Shellac, Sonic Youth, Mogwaï, Polvo, Unwound

CALL ME LORETTA "Scars"
(autoproduction – 6 titres)
Enregistré il y a près de deux ans, le premier 6 titres de ce groupe Toulousain ne voit le jour qu'aujourd'hui dû à un manque de moyen… C'est dommage car ces six premiers jets cachent une émotion touchante qui ne demande qu'à se développer. Deux ans après, le groupe doit avoir dépassé ce stade, mais à l'époque, leur noisy-pop feutrée et mélancolique est limite en place sur ce support et on a du mal à savoir si les compositions du groupe offrent tout ce qu'elles ont à offrir. Si nous faisons abstraction du jeu approximatif et de certains clichés 80's usés, nous glissons rapidement vers un univers sombre mais terriblement attirant. Tantôt bercé par une mélodie de guitare, tantôt maltraité par des orages de décibels noisy, l'auditeur aura vite fait de se rattacher à la voix de Stéphanie, hybride intrigant entre Kazu (Blonde Redhead) et Courtney Love (Hole). Ce "Scars" prouve que Call Me Loretta possède les atouts nécessaires pour créer des compositions bien au-dessus de celles qui sont présentées ici… Reste à savoir si le groupe a, depuis, affiné son jeu et développé sa personnalité en mettant de côté les évidences no-wave et les simplicités pop. Si tel est le cas, je pense que le quatuor ne tardera pas à faire parler de lui à un niveau plus mérité. C'est pourquoi j'attends impatiemment la suite.
[mg]

>> Voir Aussi : My Own (du début), Blonde Redhead, Sonic Youth, Hole

APHEX TWIN "Drukqs"
(double cd 30 titres - Warp)
Dans le monde de l'electronica, Richard D.James alias Aphex Twin est un personnage atypique. Ne sortant que très rarement ses productions (qu'on imagine pourtant multiples), n'accordant que très très peu d'interviews, l'homme reste secret. Tel un physicien ou un chimiste du son, on peut tout à fait l'imaginer travaillant jour et nuit, retranché dans son home studio et replié sur ses créations alambiquées. L'homme aime triturer, malaxer, déconstruire et expérimenter les sonorités et les formules. Sans parler nécessairement d'avant-gardisme, le géniteur de ce double album nous démontre encore avec génie toutes ses capacités à fissurer les atomes et à faire rentrer les sons en collision. Bouillonnante, dynamique et explosive la musique du maestro ne se contente pas d'exposer uniquement un 'break beat' talentueux. Elle sait aussi nous offrir des atmosphères sonores exceptionnelllement troublantes, touchantes (voire mélancoliques) et poétiques. L'utilisation du piano, de jouets et d'instruments 'improvisés' y est sans doute pour quelque chose. Contrairement à beaucoup d'autres formations, Aphex Twin donne de la vie et surtout beaucoup de liberté à ses compositions. Il y a une âme derrière ce fracas de notes ou derrière ces bruits, ces sons fuyants. L'homme livre toute son énergie, toute sa passion pour faire vivre ce qui le fait vivre. Difficile de faire ressortir quelques titres parmi ce magma cohérent de 30 morceaux. Avec ce nouvel opus que nous pouvons qualifier de visionnaire, notre autiste préféré vous invite personnellement à partager les meilleurs moments passés dans son laboratoire de fou. Profitez-en car les portes ne seront pas souvent ouvertes.
[Chris]

>> Voir Aussi : Opiate, Squarepusher, Autechre, Snårk, Plone, Björk

 

 

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Mathieu Gélézeau & Natasha Herzock
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