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SUITES ALGERIENNES 1962-2019 Première partie (Ferrandez)

BD. Le dernier épisode des Carnets d’Algérie (1954-1962) a beau avoir paru il y a 12 ans, Jacques Ferrandez n’a jamais vraiment arrêté, depuis, de travailler sur l’Algérie, pays qui l’a vu naître. Il a en effet adapté plusieurs œuvres de Camus (L’Hôte, L’Etranger et Le Premier homme), qui était né et avait vécu, lui aussi, en Algérie et a aussi adapté un roman de Maurice Attia, Alger la noire. Et quand le hirak, ce mouvement de protestation de la jeunesse algérienne contre le clientélisme et la corruption du gouvernement a vu le jour en février 2019, l’auteur a eu envie, tout naturellement, de continuer (après Carnets d’Orient et Carnets d’Algérie, les 2 cycles étant désormais disponibles en intégrales) à raconter l’histoire de ce pays, en se concentrant cette fois sur la période 1962-2019.

Un récit qui n’est, cette fois, pas chronologique puisque ce premier tome fait se télescoper 3 moments précis : 2019 avec le hirak donc, celui du coup d’état de Boumedienne de 1965 et, enfin, la montée du Front islamique du salut (entre 1988 et 1991) entre lesquels la narration va et vient, événements et personnages se chargeant de faire le lien entre elles. Comme Yanis-Paul, né en Algérie de Samira une algérienne et d’Octave, un ex-militaire en poste lors de la guerre de libération, qui est devenu journaliste et retourne, dès qu’il le peut, en Algérie pour couvrir les événements et y retrouver Nour, dont il est amoureux. Mais aussi Noémie, sa grand-mère, rentrée en France, comme beaucoup de pied noirs, à l’indépendance mais qui ne se sentit jamais acceptée par son pays et n’eut de cesse de convaincre son fils de la ramener sur sa terre natale. Ou encore Mathilde, jeune communiste idéaliste partie en Algérie à l’indépendance (comme beaucoup d’autres pieds-rouges) pour aider le pays à construire sa révolution mais qui se heurta au machisme ambiant et aux idées rétrogrades concernant les femmes y compris au sein de son couple avec Bouzid, maquisard lors de la guerre qui deviendra l’un des généraux en vue quelques années plus tard.

Un récit choral qui permet à l’auteur de passer naturellement d’une période à une autre (puisque l’on suit en fait l’histoire de familles sur plusieurs générations) tout en montrant des points de vue très différents (cela va du pied-noir nostalgique de l’Algérie française au soldat du F.I.S. qui veut imposer la charia en Algérie en passant par l’étudiante qui désire que les femmes aussi soient libres…) pour tenter de rendre compte de la complexité de l’Histoire algérienne et comprendre la situation actuelle. Une première partie captivante, certes un peu bavarde (Ferrandez utilise beaucoup le dialogue pour faire comprendre les tenants et les aboutissants des événements) mais qui nous plonge avec talent dans l’histoire récente, finalement assez méconnue, de l’Algérie, avec un humanisme omniprésent. Et un espoir : que l’Algérie (comme le dit Nour) « accepte, enfin, toutes les parts d’elle-même. La part berbère, juive, carthagénoise, romaine, chrétienne, vandale, arabe, turque et française ».

(Série en 5 tomes, 144 pages pour ce premier épisode – Casterman)

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