ALBUM. Quand on tient un superbe digipack (et on ne parle même pas de la version vinyl…) comme celui-ci entre les mains, on sait pourquoi on n’a jamais été fans de musique dématérialisée…Tout blanc, avec les sculptures en cuir très évocatrices de Talitha Kennedy pour l’illustrer, il est une formidable porte d’entrée dans l’univers de Tētēma ! Projet du duo Anthony Pateras (qui se charge de toutes les compositions)/ Mike Patton (à qui revient l’écriture des paroles, qu’il se fait un plaisir, bien entendu, de mettre en scène…) ici en version quatuor puisqu’il est rejoint par le batteur Will Guthrie et le violoniste (qui joue aussi de la mandoline) Erkki Veltheim pour son deuxième album. Qui ravira ceux qui aiment qu’on les surprenne et qu’on les bouscule dans leurs petites habitudes musicales. Ceux qui apprécient les albums imprévisibles qui nous emmènent là où on ne les attend pas. Pianos préparés, boucles de bandes, synthés bourdonnants, bruitages électroniques en tous genres (le plus souvent flippants quand même…), percussions et rythmiques inventives : voilà les ingrédients des 13 morceaux au menu de Necroscape. Avec, bien sûr, Mike Patton au beau milieu qui s’en donne à cœur joie (feulements, hurlements, caresses de crooner, chuchotements : tout y passe…mais toujours au service des compos). Un album influencé par la musique concrète (le groupe attache notamment une grande importance au son) qui donne l’impression d’avoir été enregistré alors que le groupe mettait en musique un vieux film d’horreur muet en train de défiler sur l’écran géant d’un cinéma d’art et essai. L’impression seulement car rien n’est improvisé ici et le tout est, au contraire, parfaitement en place et structuré. Les morceaux sont d’ailleurs souvent construits sur le format couplets/refrains et ont une durée qui oscille entre 2 et 4 minutes. Et capable de tout, on l’a dit. D’avoir des fulgurances quasiment hardcore-noise (Cutlass Eye) ; de proposer des ambiances lourdes et angoissantes grâce à la complicité de la batterie et du synthé (Soliloquy) ; de mêler un groove africain à des synthés saturés (Wait Til’ Morning) ; de croiser une comptine enfantine avec de l’électro façon Vitalic avant que le tout ne devienne flippant sans crier gare (Dead Still) ou de faire une reprise gourmande et délirante (surtout dans le chant de Patton) du Funerale Di Un Contadino de Chico Buarque et Ennio Morricone…
Un travail de composition exigeant, pas facile d’accès, c’est clair car il a la volonté d’expérimenter mais incroyablement inventif et audacieux. Même si c’est sûr Necroscape n’est pas le genre d’album que l’on écoute en boucle tous les jours…
(Ipecac Recordings/Rarely Unable)