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THE NOBODY (Lemire)

BD. Large Mouth, petite ville américaine un peu paumée. On y vient pour pêcher, en saison. Sinon, il ne s’y passe pas grand chose. En gros, on s’y ennuie ferme. Et les jeunes comme Vickie, dont le père tient le restau, ne rêve que d’une chose : en partir. Jusqu’au jour où John Griffen fait son apparition. A peine arrivé, il s’enferme dans sa chambre de motel et n’en sort que rarement. Peu loquace, d’apparence bizarre (sa tête est recouverte de bandages) : son arrivée fait beaucoup parler. Certains pensent même que s’il se fait aussi discret, c’est qu’il a dû commettre un crime et qu’il faut mettre ce dangereux individu hors d’état de nuire…

Marqué par la lecture de L’Homme invisible de Wells alors qu’il était adolescent, Jeff Lemire a toujours eu envie d’adapter ce roman en bande dessinée. Il s’y est attelé avec The Nobody sorti en 2009 chez Vertigo Comics (et Panini Comics pour la France). Les éditions Futuropolis rééditent aujourd’hui ce roman graphique, réalisé juste après le chef d’œuvre Essex County. Et ce qui intéresse avant tout l’auteur canadien dans cette relecture, c’est d’utiliser le côté métaphorique de L’Homme invisible. Car Griffen représente en effet l’autre, celui qui est différent, que l’on ne connaît pas, qui vient d’ailleurs. Et une fois que Lemire l’a introduit à Large Mouth, il observe les réactions de ses habitants face à ce qu’ils perçoivent comme une intrusion dans « leur » ville. Peur, mépris, haine, fantasmes : son arrivée déchaîne les passions. Et il n’est pas vraiment surprenant que les seuls à ne pas considérer Griffen comme un danger potentiel, voire carrément un ennemi, soient Marvel, un marginal et Vickie, une adolescente qui a de la compassion pour lui.

Pas aussi marquant qu’ Essex County ou Winter Road, The Nobody reste malgré tout une belle réussite. On y trouve déjà l’art de la narration séquentielle de Lemire qui fait monter habilement, petit à petit, la tension jusqu’au drame final tout en nous permettant de découvrir, par petites touches, en parallèle, ce que les bandages (qui dit bandages dit blessures si l’on continue sur la voie des métaphores…) de Griffen cachent ainsi que son trait direct et expressif (ici simplement rehaussé d’aplats de bleu clair). Sans oublier ses thématiques de prédilection : blessures cachées, fonctionnement des petites villes reculées, solitude, deuil…Bref, un très bon roman graphique, essentiel pour les fans de Lemire !

(Récit complet, 148 pages – Futuropolis)

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