BD. “Vieux grigou”, “radin”, “vieux chameau”, “grippe-sou” : le moins que l’on puisse dire, c’est que le père Piquet, le cordonnier du village, n’est pas apprécié à Saint-Saturnin…Désagréable, à cheval sur les principes, réparations facturées à prix d’or : les raisons ne manquent pas pour le détester. D’autant qu’il paraît qu’il préfère les chats (il fait sa tournée tous les soirs dès la fermeture de sa boutique pour les nourrir) aux gens…A moins que les villageois ne soient jaloux du magot qu’il a petit à petit amassé…En tout cas, quand la boutique du cordonnier reste fermée pendant 48 heures en pleine semaine, les cancans vont bon train et le neveu de Ruoms, pressé de toucher l’héritage, rapplique pour mener l’enquête…
Saint-Saturnin est un petit village mais il s’y en passe des choses ! Avidité, jalousie, désirs troubles, adultère, affaires louches : Bruno Heitz a l’embarras du choix parmi les travers de ses villageois pour concocter l’une de ses chroniques de mœurs dont il a le secret. Et après le bistrotier abusé par une femme, Tiff’Annie (qui aurait pu s’appeler Le Père Piquet si l’auteur n’avait pas déjà annoncé le titre du prochain épisode de sa série à la fin du précédent…) se propose cette fois de plonger dans l’arrière-boutique du cordonnier, dont la vie réglée comme une horloge suisse et l’amour des chats (on dit qu’il n’a jamais connu de “personne du sexe”, comme dit le postier, de toute sa vie…) cache bien sûr des secrets moins avouables.
Toujours aussi truculent (Le Bistrot d’Emile était du même tonneau), truffé de bons mots, le récit dessiné d’un trait direct et sans fioritures (il n’y a pas de mise en couleur) vire rapidement au polar campagnard qui finit par mettre à jour l’envers du décor de Saint-Saturnin ainsi que les attitudes déviantes de ses habitants. Vivement que Bruno Heitz remette une tournée !
(Récit complet, 104 pages – Gallimard BD)