BD. Etienne Davodeau continue d’alterner documentaires et fictions. Et après l’étonnant Loire, dans lequel le fleuve était quasiment le personnage principal, il revient avec Là où tu vas, un récit profondément humain dont il a le secret. Comme à son habitude (il l’a notamment fait pour Les Mauvaises gens, Les Ignorants ou Le Droit du sol) pour ce genre de récit, il a décidé de partir à la rencontre de gens pour raconter leur expérience face à la maladie d’Alzheimer. Des personnes qui en sont atteintes ou des proches dont le quotidien a été bouleversé qui parlent de leurs difficultés dans la vie de tous les jours, du manque d’établissements dédiés, des rituels à mettre en place, des écueils à éviter (comme demander à la personne atteinte de la maladie : « Tu ne me reconnais pas ? ») ou des petites astuces qui facilitent les échanges (porter une petite étiquette avec son prénom sur ses habits par exemple). Une idée qu’il avait à l’esprit depuis longtemps (15 ans apparemment…) mais qui devait d’abord germer dans la tête de la protagoniste principale : sa compagne, Françoise, infirmière de formation et qui, depuis quelques années, accompagne patients et familles dans cette épreuve. Le récit alterne donc discussions entre l’auteur et sa compagne (à propos de patients qu’elle accompagne ou de la méthode à employer pour ce récit particulier : Davodeau ne pourra pas rencontrer directement les personnes malades pour ne pas les perturber mais devra se contenter de ce que lui raconte Françoise à leur sujet), journées de travail pour Françoise qui se rend chez ses patients pour discuter avec eux, faire des activités qui les sollicitent ou les apaisent et aussi entendre leurs proches et même voyage, au Québec, à la maison Carpe Diem, une structure modèle d’accueil de personnes atteintes de la maladie. Et brosse le portrait, à travers Françoise (toujours positive et bienveillante, elle essaye à chaque fois de trouver la bonne façon d’entrer en relation avec un patient), de ces accompagnants et du rôle crucial qu’ils jouent tout en abordant les différents aspects de cette maladie qui touche de plus en plus d’individus et pour laquelle il n’existe encore aucun traitement. C’est, comme toujours avec Davodeau, touchant et captivant tout en étant digne et respectueux. Une réussite sur un sujet sensible qui doit probablement beaucoup à la complicité entre l’auteur et la protagoniste principale de son récit…
(Récit complet, 160 pages – Futuropolis)