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CRENOM, BAUDELAIRE !  1. Jeanne (Dominique et Tino Gelli, d’après le roman de Teulé)

BD. Quantité de romans de Jean Teulé ont été mis en images, souvent avec une grande réussite d’ailleurs. Mais cette fois, pour Crénom, Baudelaire !, l’un de ses derniers romans (il a été publié en 2020), c’est l’auteur lui-même qui a demandé à ce qu’il soit adapté en BD. Par Dominique Gelli, qui avait déjà mis en images Mangez-le si vous voulez, un autre de ses récits. Il voulait que Gelli aille plus loin que sa biographie romancée du célèbre poète. Et le moins que l’on puisse dire, c’est que c’est réussi. Car dans ce premier tome, qui se concentre sur la jeunesse du poète (son enfance passée dans les jupons de sa mère dont il était amoureux ; le remariage de celle-ci avec un militaire, le général Aupick, autoritaire et sévère avec lui ; ses 7 mois passés en mer sur un bateau pour le « calmer » et, surtout, sa rencontre, à son retour à Paris, avec Jeanne, actrice et prostituée pour arrondir ses fins de mois, sa muse noire…), Gelli campe un Baudelaire plus vrai que nature, loin de ce que l’on enseigne dans les manuels scolaires. Un Baudelaire outrancier et provocateur, dandy arrogant accro au hachich puis à l’opium à partir du moment où son docteur lui en prescrit pour soigner sa syphilis. Dépensier et menant grande vie à sa majorité quand il hérite de l’argent de son père avant que le conseil de famille, sur les conseils de leur notaire, ne lui coupe les vivres. Attiré par la noirceur et les rues malfamées de Paris. Un homme qui ne fait rien pour être apprécié, notamment par les femmes, mais constamment à la recherche du ver parfait qui allierait beauté et ténèbres. Un portrait peu flatteur mais probablement plus juste de Baudelaire, génial mais si torturé, cru (difficile d’ignorer l’obsession du sexe de Charles) et qui n’hésite pas à écorner la légende (mais on n’est pas vraiment surpris : Teulé l’avait déjà fait avec un autre poète dans son Ô Verlaine) que Gelli brosse avec brio, d’un trait intuitif et expressif qui fait la part belle aux aplats de noir et aux tons sombres troués de quelques taches de couleurs, la redingote rouge de Baudelaire, ses cheveux bleus, ici ou là. Le tout étant ponctué (une très belle idée !) de certains de ses poèmes illustrés par des peintures de Tino, le fils de Gelli, dans un registre proche de l’art brut, comme des incursions dans l‘inconscient étrange (la folie ?) du poète. Une biographie passionnante et particulièrement vivante. Criante de vérité aussi, que Teulé aurait (rappelons que le romancier est mort l’an dernier…) sans aucun doute beaucoup aimé !

(Récit en trois tomes, 162 pages pour ce tome 1 – Futuropolis)

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