Laurent est toujours à la recherche de son père parti 3 ans auparavant avec l’enfant de Malika. Accompagné de Marion, la caméraman qui le filme pour un documentaire, ils arrivent en Alsace, à Kirschenbach, où ils doivent rencontrer Henri Müller, dont les parents avaient fondé une entreprise de bétail avec ceux de Sidoine juste avant la guerre. Si Henri ne sait pas où Sidoine se trouve, il va par contre lui révéler des choses concernant son père que Laurent n’aurait jamais pu imaginer et qui explique ce qui l’a poussé à faire ce qu’il a fait…
8 ans. Voilà le temps qu’il aura fallu à Luc Brunschwig pour arriver à bout de cette troisième partie et enfin boucler La mémoire dans les poches. Lui qui y a mis tant de lui-même et de son histoire familiale n’avait certainement pas imaginé que ce serait si difficile mais voilà, on ne contrôle pas tout. Et il a fallu laisser du temps au temps pour que les mots sortent et, surtout, qu’ils soient justes. Encore plus que d’habitude car il s’agissait là de conter une histoire inspirée de la vie de son père qui, tout comme Sidoine Letignal, a lui aussi, petit garçon juif, vécu l’occupation nazie en Alsace !
Mais cela valait la peine de patienter ! Vraiment, cette troisième partie venant mettre un point final à un triptyque en tous points remarquable. Parti, dans le premier tome, d’une famille “bien française” aidant les immigrés à s’intégrer en leur donnant des cours de français (pour Laurent, le fils) ou en aidant leurs enfants à faire leurs devoirs (Rosalie, la mère), La mémoire dans les poches nous aura ensuite fait vivre l’implosion de cette famille pourtant unie et aimante en apparence avant de nous emmener en Algérie pour, enfin, revenir en Alsace sur les traces du papa dont le passé éclaire la personnalité (il était toujours discret), les mensonges (il s’appelait Isaac Cahen, en réalité) et l’attitude incompréhensible (l’abandon de sa famille sans prévenir 3 ans auparavant).
Une histoire forte et émouvante, pleine d’humanité (la vie est si compliquée qu’elle nous amène parfois à faire des choses imprévues, voire folles…), fermement ancrée dans notre passé proche mais aussi dans notre présent, superbement racontée par Luc Brunschwig (dont la narration, toujours ingénieuse, parvient à éviter linéarité et monotonie) qui s’y entend pour créer des personnages plus vrais que nature et attachants. Et comme le travail graphique de le Roux (avec un dessin aussi sensible qu’expressif) est à l’avenant, La Mémoire dans les poches fait un véritable sans faute. A ne manquer sous aucun prétexte.
(Triptyque – Futuropolis)