BD. Max, Arthur, Seb et Neige étaient inséparables à l‘adolescence, c’était la bande de la rue du Panorama. Et puis le soir du drame, quand ce gamin, Frédéric, s’est noyé parce que Max et Neige avaient oublié de refermer la barrière de la piscine des voisins, la jeune fille a voulu laisser tout cela derrière elle et est partie faire sa vie à Londres. Les trois amis sont, eux, restés à Clamart, avec des fortunes diverses : Arthur vit toujours chez ses tantes mais rêve moins d’explorer le monde depuis qu’il a perdu une jambe ; Max a eu un enfant, est divorcé et a du mal à maintenir Panorama, la revue littéraire qu’il gère avec Seb, à flot. Un jour, Arthur leur annonce qu’il a revu Neige. Elle est revenue s’installer dans la maison de ses parents. Pas pour longtemps car le lendemain, après un cri aussi effrayant qu’assourdissant venant de sa maison, elle disparaît…Les trois amis décident d’enquêter en parallèle de la police, avec, comme piste, une étrange fresque que Neige avait découverte sous le papier peint d’une pièce de sa maison…
Lehman. De Caneva. Il suffit de voir ces deux noms sur la couverture de Les Navigateurs pour comprendre que ce récit va, une nouvelle fois (le duo avait déjà collaboré sur Métropolis et La Brigade chimérique : ultime renaissance), nous proposer un voyage « de l’autre côté », dans un monde où rêve, créatures étranges et chimères ont cours. Un monde qui a ici pour nom « la vieille mer » et auquel on peut accéder depuis certains passages dans Paris connus de quelques initiés seulement, après s’être présentés à la Tête. C’est l’un de ces passages que Seb, Arthur et Max devront trouver pour avoir une chance de ramener Neige…Comme dans les meilleurs récits du genre, le fantastique n’apparaît, dans Les Navigateurs, qu’après 39 pages, les deux auteurs ayant d’abord pris soin d’installer l’histoire dans un Paris contemporain très réaliste, tout ce qu’il y a de plus normal. Intrigué par ce premier épisode étrange (le fameux cri), le lecteur ne pourra, ensuite, plus se dégager de la toile narrative tissée par Lehmann qui nous réserve, tout au long de son scénario inventif et cultivé (l’Art y joue un rôle majeur et des peintres comme Redon ont inspiré Lehman pour inventer Ferdinand Krebs et son style pictural, entre symbolisme et surréalisme), son lot de surprises et de rebondissements. Que De Caneva met en images avec conviction et talent dans un style réaliste très judicieux, nécessaire même pour nous faire entrer dans cette histoire. Et particulièrement fluide et clair, le dessinateur estompant astucieusement les couleurs lors des flashbacks. Enfin, le choix du noir et blanc, idoine, souligne parfaitement les aspects mystérieux de l’histoire. Une dernière chose quand même : l’objet en lui-même, soigné, est superbe !
(Récit complet, 208 pages – Delcourt)