ROMAN ILLUSTRE. Compulsion n’est pas une bande dessinée. Il s’agit d’un projet autrement plus singulier : un roman écrit par l’anglais Roberts avec lequel dialoguent des dessins de Schuiten. C’est un producteur de cinéma qui a proposé le pitch de l’histoire à Roberts afin qu’il le développe avec le dessinateur pour susciter l’intérêt des studios et qu’il devienne, pourquoi pas, un film.
Compulsion est un récit d’anticipation qui se passe dans le monde que nous connaissons dans un futur très proche. Sauf qu’un jour, des gens du monde entier se sentent « obligés » (on les appelle d’ailleurs comme cela…) de tout plaquer -travail, famille, maison- pour remplir une mission : rejoindre des lieux précis pour collaborer à la construction d’édifices, souvent de gigantesques statues à visage humain, avec des objets prélevés dans leur quotidien : échelles, ordinateurs, capots de voiture…Lee, Roy ou Alina font partie de ces Obligés et embarquent avec eux Serge, un policier, ou Vida pour aller apporter leur pierre à l’édifice sur la côte française, en Bretagne. Pourquoi font-ils cela ? Cela reste un mystère. Eux-mêmes ne le savent d’ailleurs pas. Mais le mouvement est si important qu’il désorganise totalement les sociétés et commence à inquiéter les gouvernements car ce phénomène attise les tensions, des groupes anti-compulsion potentiellement violents s’étant créés…
Un récit étrange et étonnant qui tient en haleine jusqu’au bout, notamment grâce au superbe travail de Schuiten dont on découvre ici une nouvelle facette, ses dessins en double page aux crayons proposant en effet des visions aussi puissantes que troublantes. Ils alternent avec des dessins en noir et blanc plus simples et plus petits, faits de hachures, qui se mêlent, quant à eux, au texte. On ne sait pas si les studios seront conquis mais en attendant Compulsion propose en tout cas une expérience de lecture originale et captivante.
(Récit complet, 128 pages – Dargaud)