BD. Dumontheuil avait déjà adapté Arto Paasilinna en 2016 avec La Forêt des renards pendus. Et si, depuis, il a fait un petit détour par ses souvenirs d’enfance (Pas de pitié pour les indiens) et a collaboré avec Ducoudray sur le réjouissant L’Impudence des chiens, il revient à l’univers du romancier finlandais avec Le Meunier hurlant. Fort logiquement, pourrait-on ajouter au vu des nombreux points communs qu’ont les deux hommes. A commencer par un goût prononcé pour les personnages atypiques, anti-héros parfaits ayant décidé de vivre en marge de la société. C’est une nouvelle fois le cas d’Agnar Huttunen. Un gars du sud de la Finlande qui débarque un beau jour à Oulu peu après la guerre. On dit qu’il a perdu sa femme dans l’incendie de sa maison. Notre homme a racheté le vieux moulin du village et le remet rapidement sur pied tant il est doué de ses mains. Mais le nouveau meunier a un petit grain. Il pousse des cris de loup la nuit, imite des animaux, fait exploser des blocs de glace à la dynamite…Oh, rien de bien méchant. Mais cela effraie tout de même les villageois. Et quand, en colère parce que Tervola lui a fait payer le double des autres la fois précédente, il jette la balance de l’épicier dans le puits et que la grosse Siponen tombe à la renverse dans les escaliers alors qu’elle écoutait à la porte de l’appartement de Sanelma, la conseillère horticole qu’Agnar était venu voir, c’est tout le village qui crie au fou et veut sa tête, l’obligeant à s’enfuir dans les bois. Pourtant, Agnar n’est certainement pas l’homme le plus dangereux d’Oulu…
Un récit truculent, qui flirte parfois avec l’absurde quand il tourne à la chasse à l’homme dans la nature, rude et magnifique, du nord de la Finlande ou met en scène la relation amoureuse, assez atypique, entre Nanar (le surnom que les villageois lui ont donné) et la belle Sanelma, dont l’humour noir pointe avec acuité et malice l’intolérance de la société dont les bonnes gens (que le trait influencé par le « gros nez » de Dumontheuil ne « loupe » pas), par peur de la différence, par ignorance ou par jalousie (ils envient probablement leur liberté), s’évertuent à marginaliser ceux qui ne veulent pas rentrer dans le moule. Futuropolis ressort ce même mois de janvier Qui a tué l’idiot ?, une autre chasse aux sorcières originellement parue en 1995 qui avait fait découvrir le talent original (il avait remporté l’Alph-Art du meilleur album à Angoulême cette année-là) de Dumontheuil. Pas vraiment un hasard, vous vous en doutez…
(Récit complet, 152 pages – Futuropolis)