BD. Les éditions Anspach sont visiblement tombées, comme nous !, sous le charme du travail d’Erik Kriek ! Ainsi, après L’exilé et l’excellent La Mare, elles rééditent Dans les pins, collection de récits courts originellement parue chez Actes sud/ L’An 2. Judicieusement sous-titré « Six ballades meurtrières », le livre propose en fait l’adaptation, très libre (les paroles ne sont pas toujours très explicites…) de 6 « murder ballads », ces chansons moralisatrices (se transmettant oralement, elles avaient pour but, au XIXème siècle et première moitié du XXème, d’alerter le peuple sur les dangers de tomber dans le péché…), très en vogue aux Etats-Unis, qui mettent en scène jalousie, adultère, viol, meurtre ou vengeance. Des classiques, repris par Nick Cave, Johnny Cash ou encore Hendrix, que Kriek revisite ici avec brio. Déjà sombres et sordides, les histoires, véritable envers du décor du réve américain, sont ici rendues encore plus glaçantes par le travail graphique du néerlandais. Entre Charles Burns et Stéphane Blanquet, son dessin ici proposé en bichromie (avec, à chaque fois, une couleur différente pour accompagner le noir), très encré, n’a pas son pareil pour souligner la peur qui s’instille, la folie qui menace ou encore le remord qui hante. Du grand art !
Un exercice de style réussi qui lançait parfaitement (c’était son premier roman graphique) la carrière de Kriek qu’Anspach nous permet de redécouvrir dans une très belle édition (papier épais, dos toilé…) avec une postface de Denkers qui recontextualise les différentes ballades et, en bonus, un récit inédit (La petite Sadie) en album ainsi qu’un cahier graphique. Qui confirme que Kriek est un auteur singulier, à suivre absolument !
(Recueil de récits courts, 146 pages – Anspach)
